Bon, première chose, si je t'ai blessée, je m'excuse et en effet ce n'était pas mon intention.
Je pense que c'est tout simplement parce que vous imaginez qu'être adopté sous X est intrinsèquement différent que de ne pas l'être.
Personnellement, je connais des gens qui n'ont pas bien vécu leur condition d'enfant adopté/e, et donc je constate que chez certaines personnes, il peut y avoir un manque à combler. Mais à aucun moment je n'ai fait de généralisation. Si tu me relis bien, j'emploie toujours des mots comme "certaines personnes" pour bien faire comprendre qu'il ne s'agit pas de tout le monde. Après, je peux comprendre aussi que ça n'a pas l'effet escompté si ça te fait aussi souffrir de ton côté.
J'ai bien compris que personne n'avait d’intentions mauvaises ici, mais néanmoins (ou peut être que la question du topic me gène aussi particulièrement), je trouve qu'il y a cette atmosphère de "pitié/cherchons où peut être le soucis avec ces gens" que j'ai beaucoup trop de mal à bien vivre et qui accessoirement m'a beaucoup agacé tout au long de ma vie.
En ce qui me concerne, je n'ai jamais cherché à diaboliser les enfants adoptés, mais justement parce que j'en connais et qu'eux aussi on été exposés à des paroles blessantes toute leur vie, du genre "qu'est-ce qu'ils nous emmerdent" ou "l'important c'est qui vous êtes" ou "des fois il ne faut pas savoir" sans tenir aucun compte de leur souffrance, et bien oui, je les défends car je me sens proche de ces personnes (aussi pour des raisons plus intimes que je ne dévoilerai pas ici).
Mon but n'est pas de dire que les enfants adoptés ont forcément un souci, mais simplement de les défendre dans leur droit de savoir quand l'entourage leur demande de se taire.
Il ne s'agit pas de clichés mais de vécus et de souffrances réelles, tout comme le sont les tiennes.
Mais c'est un sujet très sensible, et nous défendons une vision très différente du problème, d'où le fait que ça t'ait blessée, j'imagine.
"des dégâts" carrément...
Certaines personnes le ressentent comme ça. Ce sentiment de vide, notamment, et cette impression qu'elles ne peuvent pas s'épanouir pleinement. Mais il faudrait expliquer pleinement une situation pour comprendre en quoi ça crée des "dégâts", d'où le livre que j'ai cité un peu plus haut. Livre qui n'est pas un cliché, ne donne pas dans le sensationnel, mais le vécu d'une femme qui a mal vécu sa condition d'enfant adoptée quand bien même elle aimait ses parents adoptifs, et qui voulait en parler. (d'ailleurs son livre n'est accessible qu'en contactant directement l'auteure, en auto-édition, et absolument pas commercialisé en masse, ce n'est pas un livre "buzz" si c'est ce que tu crains).
J'ai bien compris ici qu'il s'agissait d'une hypothèse, mais il s'agit d'une hypothèse facile à mon sens et rabâchant des idées reçues de personnes non concernées. Les traits et donc ma ressemblance supposée avec ma mère biologique, je m'en fiche un peu, j'ai un peu de mal à voir en quoi c'est si important pour se définir soit même. Vraiment.
Tu as ta propre expérience, tout comme d'autres personnes ont une expérience différente.
Ce n'est d'ailleurs pas tant l'idée de ressembler à ses parents qui compte, mais vraiment l'idée d'avoir un visage et/ou un nom sur des parents dont on ne sait rien car à leurs yeux c'est une partie de leur histoire. Après, ce sentiment peut être accentué par diverses situations, par exemple dans le cas d'un mensonge ou d'un doute qu'on sème au long des années au lieu de parler honnêtement dès le départ.
Je connais de près une personne adoptée qui a souffert de ne pas savoir, quand bien même ça ne l'empêchait pas d'aimer ses parents adoptifs. Une autre a qui on a carrément menti et qui a souffert de ce mensonge. Et je peux comprendre pourquoi elles ne le vivent pas forcément bien.
Tu parlais des conditions autour qui participaient au malaise, et je suis d'accord. Le racisme, il y a aussi les réflexions des personnes "oh vous ne vous ressemblez pas" qui joue aussi pas mal et qui peuvent créer ce décalage et ce malaise, sans forcément que ça soit un problème racialiste.
Personnellement, s'il y a bien une chose contre laquelle je me suis battue toute ma vie c'est le mensonge, c'est le fait de cacher les choses. Je trouve aussi que ça participe beaucoup au malaise et j'ai personnellement vu les dégâts sur une personne concernée.
Du coup, c'est TRÈS étonnant pour moi, de ne voir que ces témoignages publics (par la TV, les reportages, les livres publiés)
Comme dit, ce livre dont j'ai parlé n'est trouvable qu'en contactant l'auteure. Aucun média à ma connaissance n'en a parlé.
Après, on entend plus souvent parler des situations qui posent problème que des situations qui se passent bien, ça c'est vrai, et ça contribue aussi à une exposition médiatique supérieure des situations problématiques par rapport aux personnes qui vivaient bien une situation.
Je respecte le fait que des enfants adoptés ai un parcours différent du mien. Qu'ils ne ressentent pas les choses comme je les ressens. Bref, on est tous différent.
Je comprends bien que tu ressens comme injustice de n'entendre parler que des enfants adoptés qui ne sont pas contents de ne pas connaître leurs parents biologiques ou à qui l'état le leur cache, mais de leur côté, s'ils le ressentent comme un problème, c'est normal qu'ils veuillent aussi en parler.
Comme je le disais, eux aussi se heurtent à certaines paroles du genre "qu'est-ce qu'ils viennent nous emmerder avec leurs problèmes et à fouiller partout" ou "pourquoi tu veux savoir?" ou "l'important c'est qui tu es", sans aucune prise en compte de la souffrance de la personne, car ces paroles veulent dire en gros "arrête de nous emmerder avec tes problèmes". C'est en ça que c'est douloureux pour ces personnes-là, pour qui connaître ses origines est important.
Après, tu parlais de personnes refusant absolument d'adopter. Pour ma part, je connais certaines personnes qui refusent de donner leur ovocytes/sperme pour ne pas donner naissance à un enfant qui ne connaîtra pas ses parents biologiques. Pas parce qu'ils pensent que être adopté/e est moins bien, mais parce que dans le nombre d'enfants adoptés, certains pourraient ressentir le besoin de connaître leur origines, et par principe, ils ne veulent pas donner naissance à un enfant qui pourrait peut-être un jour expérimenter ce besoin.
En gros, je pense qu'il n'est pas réaliste de ne tirer que la caractéristique "enfant adopté" donc "absence d'origines" dans l'existence de ce genre de questionnements chez les enfants adoptés.
Je pense que ça dépend des enfants et des situations.
Le fait même de se savoir adopté/e peut créer cette envie d'en savoir plus, par simple comparaison avec les autres enfants qui connaissent leurs parents biologiques. Tout comme les autres critères dont on a parlé (racialisation, différence physique, mensonge, etc...).
Je pense que c'est à voir au cas par cas.
Au final, par rapport à cette mise en avant des situations problématiques, il faudrait en effet équilibrer la parole, mais toutefois sans prendre le risque de tomber dans "bah voilà le contraire existe donc tais-toi".
Simplement de considérer la souffrance de la personne, ne pas la nier.
Et au final, si un enfant n'a pas envie de savoir, bah tant mieux, mais s'il a envie de savoir, bah qu'on respecte son choix aussi...