Je ne pensais pas sortir de ma grotte ainsi mais là, je ne peux pas m'empêcher d'intervenir.
En tant que kiné maxilo-facial, je suis assez surprise de cette alerte. L'une des premières choses apprises lors de ma spécialisation, c'est que l'on a au contraire beaucoup diminué le nombre des freinectomies chez le nourrisson depuis les années 80 où l'opération était pratiquée bien plus régulièrement. Il faudrait que j'ai plus d'informations pour parler de cette augmentation citée dans l'article. Mais peu importe, c'est surtout que je sens venir le méli mélo à des kilomètres... Alors voilà, j'enfile ma plus jolie blouse pour une minute information médicale.
Le frein de langue, ce petit bout de tissu qui raccroche notre langue au plancher buccal, est souvent court selon la littérature scientifique, mais en pratique, il gêne rarement au point de devoir avoir recours à une opération. En général, le fait de l'étirer suffit à rendre la liberté de mouvement nécessaire à la langue pour son bon fonctionnement. Voyez ça comme une couture trop serrée sur votre manche de t-shirt: difficile de bouger le bras sans forcer. C'est grosso modo pareil pour notre langue.
Il est important d'avoir une langue mobile à titre curatif et préventif. Un frein trop court empêche la langue de se placer correctement au repos (au palais), lors de la phonation (mais ça ne s'entend pas souvent) et lors de la déglutition. Ça peut engendrer dans l'immédiat des problèmes chez les nourrissons pour se nourrir, mais la plupart du temps, personne ne se rend compte de rien, et c'est rarement le médecin traitant ni le pédiatre qui s'en inquiètera. (Parce que la maxillo-faciale est un domaine très méconnu, y compris dans le corps médical.)
C'est comme ça que l'on finit avec des ados qui ont le bout de la langue littéralement attaché à leur gencive inférieure sans jamais avoir entendu parler d'opération - avec tous les problèmes qui peuvent suivre derrière. Sans qu'aucun médecin n'ait jamais posé les yeux dessus.
Alors je ne dis pas, les opérations abusives, ça doit bien exister comme pour tout ce qui concerne la médecine. Mais à ce jour, il y a bien plus d'enfants et d'adultes avec les problèmes liés à un frein trop court que de problèmes liés à une freinectomie. Autant je suis pour dénoncer les actes abusifs, autant il faut veiller à ne pas devenir franchement suspicieux à ce sujet non plus. Car j'insiste, la liberté de mouvement de la langue, c'est super important.
Si vous avez le moindre doute, le mieux est encore de prendre l'avis d'un spécialiste (ou d'un second). Du reste, essayer de vous détendre ! Il y a de bons et moins bons soignants, mais globalement, on fait tous de notre mieux !