@Cocoa. : je pense que tu voulais mentionner
@Pipistrelle.
@L'Oeil de la Lune : sur la dimension subjective de la définition de la richesse, c'est là que la simplicité de la démarche de l'Observatoire des Inégalités permet d'éclairer le débat. On peut avoir un rapport angoissé à l'argent, travailler de longues heures, venir d'une famille pauvre et être riche si on gagne plus de deux fois le salaire médian.
Donc Tiphaine est angoissée par l'argent et ne se vit pas comme riche de ce fait. Pourtant, elle l'est objectivement. Et du coup :
- elle peut dépenser un SMIC pour un week-end anniversaire
- elle envisage de mettre l'équivalent de plus d'un salaire médian dans un sac à main
- elle dépense 180€/mois en restos et > 200€/mois en loisirs
- elle me fait découvrir les pâtisseries Grolet. 17€ : c'est pour une pâtisserie individuelle, je suppose (oui), vu qu'une pâtisserie six persones dans une boulangerie classique coûte une vingtaine d'euro. Donc si tu gagnes le smic, tu travailles 1,5h pour te payer une noisette Grolet.
- elle peut parler de son rapport complexe à l'argent avec un·e psy (ce que ne peut pas se permettre une bonne partie de la population)
- elle vit seule dans 45m2 dans une ville très chère. Les parisien·nes que je connais vivent en studio, en coloc ou en périphérie et en couple sur ce genre de surface.
Personnellement, je trouve qu'elle vit confortablement dans ces conditions et peut se faire plaisir (une autre personnalité qu'elle le ferait sans compter, elle, elle compte et se fait plaisir). Donc... elle a un train de vie de personne riche.
Et je pense que personne ne confond pour autant son niveau de vie avec celui de Bolloré, Xavier Niel, Dassault ou Pinault.
Je pense que ce qui fait grincer des dents, quand une personne aisée dit qu'elle a du mal à joindre les deux bouts (parce qu'elle fait réparer son écurie dans sa maison de campagne) ou qu'elle a l'impression qu'elle va se retrouver sur la paille si elle est au chômage, c'est que cela est assez impoli. C'est très humain de vouloir être reconnu dans ses difficultés, c'est sûr.
Mais du coup, si Tiphaine éprouve de l'angoisse à l'idée de se retrouver sans salaire, que pense-t-elle de la situation des 90% des Français·es qui gagnent moins qu'elle ?
Je ne trouve pas que Tiphaine tienne des propos indécents dans cet article parce qu'elle est dans une situation particulière : une journaliste lui pose des questions sur son salaire et son rapport à l'argent, encore heureux qu'elle en parle!
Par contre, je trouve que les personnes qui gagnent un salaire équivalent à celui de Tiphaine et qui se plaignent de "quand même pas être si riche", "quand même devoir renoncer à des projets immobiliers parce qu'on vit dans une ville chère", "que quand même, prendre un vol long courrier A/R par an (ou trois), ce n'est pas mener la grande vie" sont un peu saoulantes.
Comment perçoivent-elles la vie et l'horizon des 90% restants (leurs livreurs, coiffeuses, vendeuses et vendeurs, esthéticiennes, serveur·euses, petites mains du monde de la pâtisserie de luxe, femmes de ménage qui nettoient leurs bureaux, caissières de leur supérette de quartier, et si parents : Ass mat, personnel de crèche, ATSEM, AED, AESH ?)
C'est un peu comme :
- je vais éviter de me plaindre de ne trouver que du 44 et du 46 dans les soldes Monoprix quand je fais du 36/38 devant une copine qui fait du 52
- je vais éviter de me plaindre du fait de n'avoir qu'une mention X au bac/licence/master devant qn qui passe aux rattrapages
- etc
Et à côté de ça, j'ai gagné plus que le salaire médian à l'époque ou j'étais à temps plein et je me sentais riche
- parce que je gagnais plus que ma mère (ce que j'ai fait dès mon premier salaire = SMIC)
- parce que je vivais effectivement dans une ville moyenne où je payais 600€/mois pour un F2 TCC de la même superficie que celui de Tiphaine
- parce que je pouvais dépenser sans compter pour mes loisirs
donc c'est vrai que je suis étonnée qu'on ne se considère pas comme riche en gagnant plus de deux fois plus d'argent.
@Althéa Vestrit : je suppose que le choix que fait cette hypothétique personne travaillant en libéral de travailler +50h/semaine est contraint (payer les locaux, les cotisations salariales d'un·e secrétaire, les assurances, etc.).
Mais peut-être que penser aux personnes qui subissent un temps partiel et donc de la précarité (
35% des personnes à temps partiel ne l'ont pas choisi et aimeraient travailler à temps plein, les trois quarts des personnes subissant un temps partiel sont des femmes... sachant qu'une partie des femmes qui "choisissent" de travailler à temps partiel le font pour s'occuper de leur famille : elles échangent travail salarié contre travail gratuit (plus d'infos ici) ) permet de prendre un peu de perspective ? Ici, la personne fait le choix de travailler plus (et peut-être de s'exploiter). C'est un luxe en soi.
Et tu dis que cette hypothétique personne gagne plus que Tiphaine (donc plus de 4500€/mois. Du coup, elle est à quoi ? 5000 ? 6000€/mois ?). C'est simpliste, mais si on divise ses heures travaillées (disons 55h) par deux (27,5) et son salaire aussi : 2250 ou 2500 ou 3000€/mois, elle se retrouve quand même avec un salaire supérieur à la médiane (sans pour autant accéder au seuil de richesse) tout en travaillant moins que la moyenne. Alors, forcément, cela ne prend pas en compte les charges (fixes, du coup) et cela impliquerait un changement de statut (salariat, remplacements...), mais c'est possible.
Cela dépend de ce qu'elle préfère : gagner énormément d'argent (par rapport à 90% de la population) ou travailler moins et gagner moins (sachant que la plupart des gens ne sont pas en mesure de faire ce choix).