@Mrs Sulu Je vais me baser principalement sur cette très bonne vidéo de Franchesca Ramsey pour te répondre :
https://www.facebook.com/chescaleigh/posts/10157471619220364
En fait il faut savoir qu'il y a un historique derrière les conditions d'accès au vote, qui est qu'il n'y pas si longtemps, on exigeait des étatsunien-ne-s noir-e-s et non-blanc-he-s en général des choses qu'on exigeait pas des autres, comme le fait
de connaître par coeur la Constitution pour pouvoir voter, ou de répondre parfaitement à un test d'orthographe. Quand il ne s'agissait pas purement de mentir en disant à ces électeur-trices qu'ielles s'étaient trompé-e-s de date, de bureau de vote, etc.
Tant et si bien que pendant les mouvements pour les droits des non-blanc-s aux USA dans les années 60, une loi a été passée pour interdire toute discrimination à l'encontre des électeur-rices. Notament, l'article 5 de cette loi (Voting Rights Act, 1965) spécifie que les états ayant un passif de discrimination au vote
doivent obtenir une validation fédérale pour tout changement des conditions d'accès au vote. Mais depuis 2013, la Cour Supreme a jugé (suite à un jugement en Alabama, Shelby vs Holder) qu'assez de temps avait passé et que ces états pouvaient maintenant changer les conditions de vote sans validation.
En résultat, de nouvelles lois sur les conditions d'accès au vote ont pu être passées, demandant la présentation d'un permis de construire, d'une pièce d'identité valide, d'avoir été enregistré à l'avance via des procédures administratives bien particulières, etc. Ça peut paraître étonnant depuis un point de vue français-e car (il me semble) la majorité des français-e ont une pièce d'identité, sont enregistrées sur les listes électorales, mais il faut voir qu'aux USA la relation entre les citoyens et l'enregistrement à l'Etat civil est différent. Je ne m'avance pas plus sur ce sujet car je ne le maîtrise pas.
Toujours est-il que ces lois, dans leurs effets (ce qui amène donc à questionner leurs intentions), rend plus difficile l'accès au vote pour des populations précaires, pauvres, ce qui dans ces états
recoupe aussi une forte proportion de populations non-blanches. Ça me fait penser à ce qu'on a pu voir récemment sur la "War on drugs" aux USA. Initialement, il s'agissait de lutter contre le traffic de drogues, de façon très dure, en emprisonnant les gens pour des délits somme toute mineurs comme la simple possession. Et dans les effets, ces lois ont majoritairement visés les étatstunien-ne-s noirs (et en particulier les hommes étatsuniens noirs). Jusqu'à ce que ... un grand nombre d'étatsunien-ne-s blanc-he-s se mette à consommer de la drogue, développe des addictions, etc. Et à partir de ce moment là on a pu observer un renversement de la situation, où le problème de la drogue aux USA n'était plus un problème de délinquance
mais un problème de santé publique (un-e noir-e qui se drogue, c'est un-e délinquant-e, un-e blanc-he qui se drogue, c'est une victime qui a besoin d'aide). Ce qui nous ramène donc à l'utilité même de cette "Guerre contre la drogue", et sa finalité : au final le problème n'a jamais été la drogue, mais les populations qu'on pouvait viser
via ce discriminant. Encore aujourd'hui, les consommations de cannabis sur un campus universitaire blanc et dans une banlieue (pauvre par exemple) noire, reste sanctionnées de façon totalement différente.
Donc pour revenir aux lois sur l'accès au vote, comme l'explique Franchesca Ramsey (et d'ailleurs elle cite Fox News à ce sujet, qui est plutôt du côté conservateur), la raison présentée (la fraude au vote) est absolument anecdotique, c'est un événement infinitésimal dans le processus de vote à l'échelle du pays. En revanche,
les effets eux sont loin d'être anecdotiques puisqu'ils ciblent des groupes sociaux bien précis. Si on ramène ça au contexte français, on peut aussi questionner la lutte à la fraude aux allocations sociales qui est un sujet politique porteur, par rapport au sujet délaissé de la lutte contre la fraude fiscale des entreprises (on se rappellera des 13 milliards d'arriérés d'impôts non réclamés par la France à Apple), ou la lutte contre la fraude dans les transports, autant de procédés qui coûtent parfois plus cher qu'ils ne rapportent, ce qui pousse à nouveau à questionner les motifs (chasse aux pauvres, chasse aux racisé-e-s, etc.).
Pour conclure il y a aussi cette vidéo de Robert Reich qui explique comment
le découpement des zones de vote (toujours aux USA) permet aux républicains (mais j'imagine que les démocrates en seraient capables aussi) de s'assurer des victoires électorales : à partir de 1'30