Je ne supporte pas toutes les petites situations de violence symbolique que la vie quotidienne implique. Ces situations où les gens se sentent jugés, ont peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas avoir assez de répondant, d'être ennuyeux, d'être hors sujet... ça me fait très mal au cœur quand je décelle ce genre de situations. À une époque j'étais souvent en proie à ce type de violence, c'est à dire que j'avais souvent peur de m'exprimer en public sur des sujets dont je ne connaissais rien ou que je ne maitrisais pas (le pire étant la politique). Disons que je le faisais, en jouant d'auto dérision pour masquer mon malaise, mais que je me sentais quand même bien gênée, que j'avais peur de dire des choses bêtes ou inintéressantes. Maintenant que j'ai réussi à donner un nom à ce sentiment d'illégitimité que je pouvais ressentir parfois lorsque j'ai l'impression de ne pas avoir ma place dans la conversation, je le vis bien mieux. J'ai de moins en moins de "complexes sociaux", même si parfois ils m'explosent à la face.
Mais par contre je ne supporte pas de sentir que les autres souffrent de cette violence symbolique, et de ne pas réussir à les en sortir. Parfois même j'ai l’impression que sans le vouloir c'est moi qui les y ai mis, en leur posant une question sur un sujet à propos duquel ils n'ont aucune aisance à parler par exemple. Mais parfois c'est plus subtile, et ça peut se ressentir même sans que la personne ne dise le moindre mot : je vois que la personne est mal à l'aise après avoir écouté quelqu'un s'exprimer, car maintenant elle a l'impression que c'est à son tour de dire quelque chose, or elle n'a pas les mêmes cartes en main pour s'exprimer sur le sujet. Ce côté “tribunal” qu'a parfois la vie quotidienne même dans les discussions les plus anodines me fait vraiment mal au cœur.
Par exemple quand je reviens de congés scolaires et qu'on me demande ce que j'ai fait de mes vacances (oui je n'ai que ce mot à la bouche depuis mon retour, navrée
![lol :lol: :lol:](https://forum.mmzstatic.com/smilies/icon_lol.gif)
), j'adore raconter des anecdotes cocasses qui me sont arrivées lorsque je suis partie en voyage. Certaines personnes aiment bien me demander parce qu'ils savent que vu la façon dont je voyage, il risque toujours de m'arriver des bricoles et que je risque d'avoir des choses à raconter, du coup je suis contente qu'ils me lancent sur le sujet et j'en parle avec enthousiasme. Je vois que certains sont friands de ça, mais j'ai l'impression parfois que j'en mets d'autres mal à l'aise quand je raconte ce que j'ai fait de mes vacances, ou que je les soule. J'ai peur de monopoliser l'assistance vu que j'ai plein de trucs à raconter et que j'adore raconter, et tant que ça fait rire les autres et qu'ils me posent des questions je continue. Mais au bout d'un moment, quand c'est aux autres de raconter leurs vacances, parfois certains font une tête un peu “décomposée” et disent qu'ils ont été voir leurs parents ou qu'ils ont avancé dans leurs dossiers scolaires, en prenant un ton assez monocorde, comme si ça ne valait pas le coup d'être dit. Ça me fait trop chier parce que j'ai l'impression qu'en racontant mes histoires un peu “fantasques”, j'ai lancé la conversation sur un mode particulier, et que du coup les gens ne se sentent pas forcément de parler de leurs vacances à eux après. Du coup parfois j'hésite à leur demander “et toi ?”, parce que je vois bien qu'ils ont la flemme d'en parler, et que je les comprends. Et en même temps, je me dis que si je ne pose pas la question alors que je me la pose, ils pourraient le prendre comme du désintérêt de ma part, alors que ce serait plutôt pour les ménager d'un embarras. Ça me fait chier et je déteste ça, j'ai peur d'avoir l'air condescendante quand j'écoute quelqu'un me dire qu'il a travaillé pour les partiels pendant toutes les vacances, j'ai toujours peur de renvoyer l'image d'une fille qui pense “moi j'ai fait un super voyage, j'ai fait des choses qui sortent de l'ordinaire et toi tu es resté dans ta routine, pauvre de toi”. Alors que je connais tellement bien ce genre de vacances “sédentaires” que je suis à milles lieues de mépriser ou d'émettre une
quelconque hiérarchie à ce sujet. Bon là je psychote et je sur interprète, j'ose espérer que les gens ne me voient pas comme ça, et je tente toujours d'éviter au mieux la violence symbolique. Mais je trouve que ça illustre bien ces situations où la conversation prend des allures de tour de table gênant. Finalement je crois que je préfère être dans la situation de la personne qui est gênée que dans celle de la personne qui “gêne” en plaçant la conversation sur une zone à risques.
pas citer svp, j'éditerai !