Aqueuse : Étymologiquement tu as parfaitement raison : la misanthropie c'est la haine de l'humanité en général, pas de l'individu en particulier, et de ce fait, de par la façon dont il se définit dans cette citation, Dostoievski (ou son personnage) n'est absolument pas misanthrope.
Pour revenir un peu à nos moutons, je n'ai pas vraiment ressenti de mépris dans cet article, plutôt un certain cynisme, ce qui explique sans doute qu'il me semble à la fois très drôle, très intelligent et très triste. Très drôle dans la forme, très intelligent dans l'érudition dont il témoigne et très triste... parce que j'espère bien ne jamais en arriver à éprouver une telle amertume et une telle résignation vis-à-vis de mes semblables !
Mais ce qui est dit sur les "small talks" me semble très vrai. Ce type de conversation m'a toujours semblé être l'illustration parfaite de ce qu'en théorie de la communication et en linguistique on appelle la "fonction phonétique du langage" : ça n'a pas de fond ni de consistance, ça se résume à un simple jeu de représentation sociale. Il s'agit juste d'établir un contact sonore.
Et j'avoue que je n'aime pas ça. Ça me fatigue, je n'ai jamais aimé le principe du "parler pour ne rien dire", juste histoire de se faire entendre. Reconnaissons-le, ça n'apporte rien, et c'est d'un ennui mortel.
Mais il ne faut pas oublier l'avantage immense que cela comporte et qui excuse toute la vacuité de la "small talk", c'est, comme le rappelait une autre personne dont j'ai oublié le nom -désolée- que c'est un mal nécessaire :
Ben oui, il faut en passer par la "small talk" pour avoir l'agréable surprise de découvrir la véritable personnalité de l'autre. Parce que dans la vraie vie c'est quand même rare de pouvoir déceler au premier coup d??il chez quelqu'un le savoir et la passion. Il faut small talker pour avoir la chance de se laisser surprendre.
Cependant, si on en est à gérer nos relations sociale tout le temps selon le modèle de cet article, il faut s'inquiéter je pense. De même si on n'a jamais l'occasion de pratiquer une conversation plus élaborée qu'une "small talk", car le problème ne vient pas tout le temps des autres.
Certains jours les gens me déçoivent tellement que je suis d'humeur propice à mépriser tous les importuns qui s'aviseraient de venir me parler de sujets dont je me contrefous et qui m'apparaissent bien superficiels. Mais en général, fort heureusement, quelqu'un finit toujours par me surprendre positivement, et si ce n'est pas le cas, en y repensant une fois calmée je me rends bien compte que cela provient essentiellement de mon attitude : on n'élève généralement pas le débat vers le haut quand on est trop prompt à croire à sa médiocrité !
Pour conclure, parce que j'ai un peu l'impression de m'embrouiller, je pense que l'auteure s'égaierait un peu la vie si elle essayait d'envisager un peu l'idée que les autres peuvent lui apporter quelque chose, et cessait de les présupposer bêtes et creux. Je suis une grande timide, et en vertu de ça, je ne peux pas lui reprocher d'être incapable aller vers les autres, mais à défaut il est plus judicieux d'éviter de les repousser par une attitude négative. Et en gardant l'esprit alerte, on obtient généralement de multiples possibilités de faire dériver une small talk vers des conversations un peu plus profondes.