Ca dépend de la façon dont on comprend "négationnisme", non ? Je suis allée chercher une définition, parce que j'avais besoin d'eclaircissements, et voilà ce que j'ai trouvé (Wikipédia est mon ami) :
Le terme négationnisme désigne, dans sa signification première, la négation de la réalité du génocide pratiqué par l'Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale contre les Juifs, c'est-à-dire la négation de la Shoah. Le négationnisme consiste ainsi à prétendre, notamment par la négation de l'existence des chambres à gaz homicides ou de la volonté d'extermination des Juifs d'Europe par les nazis, que la réalité de ces crimes relèverait de mythes.
Par extension, le terme est régulièrement employé pour désigner la négation, la contestation ou la minimisation d'autres faits historiques, en particulier ceux qu'on pourrait qualifier de crimes contre l'humanité. C'est le cas pour le refus de reconnaître le génocide arménien perpétré par le gouvernement Jeunes-Turcs de l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale, l'Holodomor ukrainien[réf. nécessaire], le massacre de Nankin par l'armée impériale japonaise, le génocide au Rwanda, le Goulag et les massacres pratiqués par les Khmers rouges au Cambodge ou le Laogai de Chine. Bien que ces épisodes se soient déroulés dans des circonstances historiques variées et qu'ils aient été commis avec des moyens divers, on retrouve de nombreux traits communs dans leurs négations respectives. Boris Cyrulnik définit le négationnisme comme un message adressé aux survivants: « Crevez, votre souffrance nous importune. »
L'utilisation du terme « négationnisme » au sens élargi à d'autres faits historiques que les crimes, définit la négation d'une réalité historique quelconque (économique, sociale, politique, etc.), malgré la présence de faits flagrants. Cet usage est aussi influencé par l'anglicisme « negationism » interprété comme étant la révision illégitime de faits historiques. À titre d'exemple, on a parlé de négationnisme à propos de la qualification officielle d'« opération de police » pour la guerre d'Algérie, mais les historiens préfèrent utiliser le terme de « déni historique ».
Dans cette définition, c'est surtout l'interprétation de Cyrulnik qui m'interpelle : c'est vraiment une façon de dire aux victimes, à leurs familles qu'on n'en a rien à foutre d'eux, qu'il ne faut pas exagérer, ce n'est pas si grave, il n'y a pas à en faire toute une histoire de ce qu'il s'est passé. Si on ajoute à ça le fait que c'est aussi une façon muette d'encourager de nouveaux comportements de ce genre, évidemment que je suis pour l'interdiction du négationnisme. Mais d'un autre côté, est-ce que forcer des personnes à se taire ne risque pas de les rendre encore plus dangereuses ? "Non, vous n'avez pas le droit de vous exprimer" "Ok, alors on va agir".
C'est difficile de donner une réponse tranchée, dans la mesure où autoriser le négationnisme tout comme l'interdire peuvent avoir des conséquences très fâcheuses et dans tous les cas, les nazis peuvent le prendre comme une provocation/un encouragement, et que ce n'est certainement pas ça qui les fera taire. Le Pen, par exemple, ne s'est jamais caché, même après sa condamnation, de penser en termes négationnistes, et continue à en faire son fond de commerce :
regardez comme je suis oppressé, regardez comme je suis à plaindre, regardez dans quel pays nous vivons, n'est-ce pas honteux, mes amis, de ne pouvoir s'exprimer en toute liberté ? A partir de là, ça devient facile comme jamais de gagner des électeurs, de se mettre des votes dans la poche de la part de personnes un peu perdues qui vont s'indigner sur les libertés qui se perdent.
Mais d'un autre côté, il faut protéger les victimes, leur mémoire, et le futur de notre monde qui n'est jamais à l'abris du risque d'un tel massacre, et nier ça, c'est nier ce risque, c'est nier le fait que l'humain est capable du pire quand il a peur, quand on le menace, quand on lui lave le cerveau. Les plus forts d'entre nous peuvent se retrouver pris dans ce cercle vicieux sans même s'en rendre compte.
Alors, pour trancher, quand même, je dirais, oui, je suis pour l'interdiction du négationnisme. Je préfère priver ces gens de leur liberté de parole, de pensée, même, que de prendre le risque qu'un jour des gens soient tués parce qu'ils pratiquent une religion particulière, parce qu'ils ont des pratiques sexuelles différentes, des origines différentes, une apparence à laquelle on n'est pas habitués. C'est un mal pour un bien, mais parfois, il faut consentir à certains sacrifices. Si vis pacem, para bellum.