Bonjour à toutes et à tous!!
Je suis nouvelle sur le forum et je voudrais vous présenter un texte que j'ai écrit sur la rencontre, il est un peu long, désolée! Je vous souhaite bon courage et j'espère qu'il vous plaira!!
Bisous!
On sonne à l’interphone alors que j’erre dans l’appartement depuis presque 20 minutes, ne sachant malheureusement pas quoi faire de ma pauvre carcasse. Je réponds et une voix féminine, que je reconnais me demande de descendre. En pyjama, robe de chambre qui traine par terre, je prends mes escaliers et atterrit dans le hall de mon immeuble. Mes pieds nus caressent la poussière du sol. Elle est là, appuyée contre le mur à l’extérieur, elle écrase sa clope sur le béton, et pose son regard sur tous les objets sur lui sont présentés dans la rue. Elle m’attend et je la laisse patienter, savourant cet instant de puissance. Je me demande au final ce qu’elle veut de moi en cette après-midi ensoleillée. Elle finit enfin par me remarquer derrière la vitre de la porte d’entrée et m’adresse un signe de la main. Je m’approche doucement de l’intruse et lui ouvre. Elle me regarde, je la regarde. Pas un mot, pas un signe mais elle fonce sur moi. A deux doigts de m’embrasser, elle s’arrête et frôle mes lèvres. Je sens sur mes bras et mes mollets une vague de frisson qui m’assaille. Elle incruste ses yeux sur les miens et sourit.
-Tu veux une clope ?
-Pas de refus.
Elle sort de son sac un paquet de Camel et m’en tend une. Sous un silence tendu, nous fumons, aspirant sans relâche la fumée et la recrachant avec ferveur. Cependant, jamais nos regards se sont séparés, l’un dans l’autre, arrachés de leur orbite pour survoler nos corps nus sous nos habits en dentelles. Pas un seul instant ses lèvres ont quitté les miennes, pas un seul instant les frissons n’ont quitté ma chair. Quelque chose de physique se passe entre nous. Quelque chose d’infime, transparent, lourd et pressant. Attirante hyène, tachetée de sang et de gadoue. Elle secoue ses poils et je fonds. Je craque, biscuit salé, monstre de beauté. Je rampe sous ses draps de satin, poupée de paille, prête à prendre feu. Elle m’envoie sa fumée au visage. Je la vois à travers et mes cheveux brûlent.
-On monte ?
Je plonge encore un peu plus dans ces yeux. J’allonge les bras et les jambes dans l’acide de ses pupilles.
Retenant la porte, elle me passe devant, je retiens ma respiration pour ne pas succomber. Ses fibres se dispersent dans les bulles de savon de mes pensées.
A l’étage, les clés cliquettes sur la liquette et la grille du Paradis s’ouvre sur la libre Vénus. Tout est permis dans l’antre de Judas et chaque chose devient être. Toujours hyène, toujours fourbe, elle découvre et se découvre. Un peu plus et Eve se présente à moi, croquant ma pomme. Des traces de rouges à lèvres aux coins des genoux, un peu de lait au détour d’une rue.
S’allongeant sur le sofa rouge sapin, elle laisse entrevoir à travers ses hauts airs une tendance suicidaire. Elle roucoule sur la banquette, chouette se dit la chouette, la nuit va bientôt tombée. Elle glisse sur l’herbe mouillée du parquet et je fonce vers elle pour ne pas qu’elle s’assomme. Entre mes bras, ses rats se décrochent, je les laisse mourir. Son sourire éclaire la mare aux canards et fourmille de verre pilé. Je l’embrasse de toute mon envie, elle s’évapore. Réapparaissant au bout de la voie, le train la frôle, incitant les loups à sortir de leur tanière. Entre leurs griffes, elle perd pied et je l’embrasse encore. Nos lèvres déterrées enlisent la hache de guerre, mon corps se liquéfie et je m’abandonne à elle. Délivrée de mes sens, je la laisse prendre son scalpel et ouvrir mes tripes. Elle déballe une par une mes peines et les étalent sur la nappe. Elle dessine au creux de mon dos son avenir incertain, livré aux grès des vents sucrés. La douleur s’efface aux prix du plaisir et jamais désir n’a semblé plus fort qu’à l’instant de la morsure. Quand son esprit pénétre ma digue fendue, je ne puis retenir mes cordes vocales d’hurler ma haine. Je perds mon souffle. Je perds ma vue, mon touché, mon ouïe et mon goût. Seule sa présence nourrit mes sens.
Je frissonne seule sur ma couette, le cœur battant de piverts. Les cheveux entremêlés de suie, je noue des nœuds dans sa crinière sage. De longues boucles traversent le salon et dessinent sur la moquette des routes sinueuses, sauvages, la poussière galopant entre chaque versant. Allongée sur le ventre, elle regarde le ciel à travers le toit et susurre des phrases légères. Tortueux, et dénués de sens, les mots lient entre nous un lacet acerbe, acide et provocateur. Elle m’incite aux pires pensées, mes bulles de savon explosent. Je roule sur le côté et secoue mes lianes au sol, déposant de fines brindilles, des feuilles rouges et bleues. Je roule de l’autre côté, et elle m’attrape, enlace ses doigts entre les courbes de mes hanches et crache sur le reste, comme un chat malade. Elle remue le venin à l’intérieur de mon sang, je bouillonne. Je la retourne sur la peau de chèvre puante, grouillante de vers et de limaces. De l’étage, on peut apercevoir le dessin d’une falaise creuse, remuante et changeante. Tout craque en dessous, je l’entends gémir mais elle m’appartient maintenant. De la courbe charnue et sèche de ses seins à l’ossature de ses chevilles, en passant par la chaleur de son sexe. Absolument chacun de ses pores transpirent sur les miens. L’amazone libertine se débat, rugissant chaton de coton. J’embrasse et arrache de mes dents la sirène chatouilleuse. Elle renverse la cadence et me voilà esclave de ses passions. Son regard s’amplifie, ses pupilles écrasent la rondeur farfelue de ses yeux. Je sens son désir au son de ses narines, qui soufflent et s’essoufflent.
-C’est par ou les toilettes ?
Du doigt, je lui fais deviner le lieu-dit. Elle soulève sa taille, ses lèvres et ses pieds, marche d’un pas assuré, raclant le sol de son index cassé. Je profite de la vue que sa marche m’offre et je sublime mes rêves de sa vision brumeuse. Elle revient quelques instants plus tard, habillée et rasée. Son vieux jean grisâtre, troué aux genoux et aux cuisses arpente ses jambes, à la manière d’un pot de peinture sec reversé sur elle.
-Je t’appelle.
Elle m’adresse un sourire, la clope déjà au bec et claque la porte avant de partir.
Libre à nous de croire que l’amour est volage, périmé et enjôleur. Il zigzague dans la mer suintante de nos vies, s’arrête parfois sur le ravage mais repart dès qu’il est apprécié. Car l’amour n’aime pas être aimé. A l’instant où il sent de l’amour en retour, il repart à reculons pendant notre sommeil. A notre réveil, c’est tout comme rien ne c’était passé. Ainsi, nous vivons incertain et tremblant, à l’affût sur la plage, de voir partir ou arriver, un amour désuet.
On sonne de nouveau à l’interphone en ce joli mois de mai. Plusieurs mois ce sont écoulés et la libellule a déjà fait son nid. J’entends parfois le matin, les plus jeunes larves réclamer justice. Cette fois habillée, je réponds à la sonnerie, qui s’avère être cette même inconnue. J’ouvre et rouvre, la porte magique de l’entrée. Cette fois, je la laisser monter. Elle frappe, ou plutôt gratte à ma porte, un joli petit chaton affamé. Je la laisser patienter, et l’observe à travers le judas de ma porte d’entrée. Elle ne sait pas où regarder et j’essaye de lire dans ces pensées. Je devine des flocons de feuilles, fleuries et bien nourries, dans des cases de verres polis. Dans ces mêmes cases, on peut goûter la rosée du soir et la brume du matin, entendre le coucher du soleil et caresser le cri des hirondelles. A côté, il y a plusieurs enclumes de plume, aussi brillante et soyeuse que le crin du cheval. Dessus, il y a inscrit le nom d’une multitude de personne : Anna, Arthur, Marguerite, Sabine, Gaspard, Sarah, Julie, Marie, Paul, Jules, Fanny, Violette, David, Simon, Barnabé, Justine, Xavier etc. Je les lies un par un et tente vainement de trouver leur origine. Dans les rosiers du jardin de ma voisine, il y avait aussi des prénoms écrits sur les pots en céramique. Cependant, ils étaient beaucoup moins nombreux et portaient une signification beaucoup plus profonde : il s’agissait des prénoms des enfants qu’elle avait perdu, qu’ils soient morts nés ou tout simplement mort. Yves, mort à 3 semaines dans son berceau, Eléonore morte à 6 mois noyée dans son bain, Hortense morte à l’âge de 9 et demi, renversée par un camion benne ou plutôt écrasée ou peut être étouffée par un monceau d’ordures, lâchée sur son petit corps frêle d’enfant. Puis venait Thibault et Jeanne, ses jumeaux, morts tous les deux à un jour d’intervalle, l’un étant tombé de la fenêtre gauche de sa chambre, l’autre étant tombé de la fenêtre droite de sa chambre. J’ai toujours pensé qu’une véritable malédiction c’était abattu sur cette pauvre vielle femme. Peut-être qu’elle avait conclu un pacte avec le diable, lui garantissant une progéniture abondante, tant qu’elle acceptait d’avoir des relations sexuelle avec lui. Elle se sera lassé de lui et par vengeance, il aura juré tuer tous ses enfants, un par un s’il le faudrait pour la punir de sa désobéissance.
Enfin bref, ma jolie brune m’attend toujours devant la porte et je lui ouvre enfin, vêtue d’une simple mais brûlante robe. Son regard n’a pas changé cependant. Vif, aiguisé, tendre et maladif. On sent son vertige sous ses pupilles ensanglantées. Le froid de l’extérieur s’engouffre dans les plis de ma robe et voyage sans détour au travers de ma chair. Je veux polir de mes griffes le haut de son crâne, lustrer ses cuisses de ma langue fourchue et râper ses seins de mes doigts cornus. Je ne cesserais jamais de vouloir d’elle et si elle se trouve devant moi à cet instant, je doute de son absence de désir envers moi. Je ne suis pourtant qu’une simple voisine, on se croise, se dit bonjour et bye-bye Blondie. Je crains de ne ressentir en moi la défaillance d’un tracteur sous un soleil plombant. Je glisse sur le sol de l’entrée et c’est elle qui me tire jusqu’à ma chambre. Bordélique mais changée, cette pièce ressemble à deux gouttes d’huile à un musée fermé. Elle lance mon corps lourd sur mon lit et déplie mes membres. Etoile de mer sur son rocher coulant, j’attends depuis longtemps ce moment. Elle m’attache ensuite au barreau du lit et me voilà suspendu dans le vide de notre passion, prête à succomber sans protestation à nos jeux d’enfants. Cependant, elle me laisse la bouche ouverte, les yeux ouverts. Fantastique ! Je vais pouvoir sentir et jouir pleinement de son corps et ses caprices. Je pourrais entendre ses cliquetis, ses pas chassés sur mon ventre. Je pourrais goûter au désir et à la tendresse qui émanera de ses lèvres. De mes yeux grands ouverts, le spectacle sera émouvant et glaçant. Je rêvais du jour où je pourrais voir une hyène chasser son gibier.
Elle commence sa traque par me débarrasser de ma dentelle, chassant la poussière à coup de pelle. Craque, craque petit animal sans défense, cours, cours rongeur à pattes courtes. Ensuite, elle gigote légèrement et de son oreille sort un serpent. Elle le fait glisser doucement sur ma carcasse détendue et je sens la peau froide et visqueuse de l’animal sur ma peau enflammée. Il passe et repasse, accélérant à chaque passage. Je plisse mon corps entier sous son gourou. Soudain, il s’aventure dans des recoins sombres mais accueillants et mon échine se tord violement en deux, retenant ma respiration et mon éclat. Une fois terminé, elle siffle habilement et l’animal reprend place au creux de son oreille.
Toujours allongée, toujours soumise, j’attends de voir ma prochaine punition. J’observe dans ces yeux jaunes crocodiles des nuances orangés, brûlantes et malmenantes. Elle me veut du mal et j’adore ça. Elle s’approche de moi et caresse ma joue de ses dents criards. Sa langue pointue et sèche lime le bord de mes cils. Je sens son haleine fraîche et diabolique jouer avec mes nerfs hachés.
Elle détache alors les cordes de mes poignets et libèrent mes désirs, volants et murmurants. J’entends leurs paroles pressantes, leur volonté divine. Ils m’aspirent et m’ordonnent de courir vers elle, de lui mordre le cou et de laisser le sang se répandre la pelouse d’un jardin en hiver. De voir gouttes à gouttes la marée s’écrasée sur la neige doré. Je pressant sous son pouls une pression disgracieuse. Rien de beau, ni de doux, rien de léger ni de faux. Tout est sauvage, tout est grinçant.
Finalement, elle quitte la pièce plongée dans la nuit la plus lourde, par l’ouverture de la porte. Sur les murs blancs de ma chambre, on sent encore sa présence, on lèche sa sueur sur la commode du fond, on suit des doigts les griffures du matelas. Je la retrouve dans l’innocence d’un salon conformiste. La télé est allumée, le canapé confortable. Le buffet étouffé de vaisselle, le piano désaccordé. L’ordinateur clignote, les bougies vacillent. De petites lumières clignotent elles aussi, signaux d’un mal en patience. Tout semble vide mais la voix nasillarde de la journaliste comble l’espace libre entre elle et moi. Je rampe vers ses pieds glacés et les embrasse.
-Si je reste là pour la nuit, me promets-tu de ne pas me manger ?
-Me promets-tu de dormir avec moi ?
Ses yeux profonds sourient et je pleure.
-Tu veux dire, dans le même lit ?
-Oui. Mais aussi dans le même esprit, dans le même rêve, dans la même peau, dans la même cuillère, dans le même pot, en boule et sous additif. Livrées et libre ensemble dans la nuit noire du crépuscule. Vendre cette nuit aux fantômes pour ne pas fermer les yeux et te cueillir au réveil d’Amok.
-Tu n’as pas peur qu’on étouffe ?
-On est déjà en apnée. On ne respire plus depuis longtemps. On suffoque et l’air manque.
Elle se lève et dirige son doigt vers cette femme à la télévision.
-Elle aussi suffoque ?
-Elle ? Je crains qu’elle ne soit déjà morte.
Elle parait sourire et je porte ma bouche à son oreille.
-C’est bientôt notre tour, alors profitons de ce qu’il nous reste d’oxygène pour rêver.
Elle m’embrasse et m’injecte un poison dans les veines. Le sang emplit ma bouche mais elle l’avale goulument. J’entends chaque gorgée coulée dans ses poumons. Quand j’ouvre de nouveau les yeux, elle se tient encore près de moi et je l’emporte sur le canapé. Toutes deux sur le dos, on regarde les étoiles brillantes du plafond. Elle brille de plus en brille, depuis que le soleil a quitté notre Terre. Soudain, le toit se soulève et je sens comme une odeur de brulé. Le plafond fond et pour la première fois depuis des mois, le ciel apparait sous mes mirettes grises, abasourdies et muettes. Il est encore plus beau que dans mes souvenirs. Il ressemble à un tableau impressionniste. Il vole au vent et les ovnis circulent librement, sans se soucier des frontières.
Elle me tient la main et je la serre encore plus fort. Elle a peur et je le sens. Je me tourne vers elle et la frôle des yeux. Elle se jette dans mes bras et c’est presque en essuyant ses larmes que je succombe à son charme. Je la console et la câline. Elle a besoin de moi et je la veux.
Sans s’en rendre compte, on s’envole dans les cieux, ensemble et jointe par nos deux mains, moites et perlées de gouttes brunantes. On a peur mais on s’aime. On ne sait pas où l’on va mais on s’aime. Tout nous semble étranger mais on se sent bien. Jamais je ne me suis sentie aussi heureuse et libre, aussi légère et vivante que dans ce cosmos multicolore. Elle me regarde et sur son visage torrentiel se glisse un espoir, une libération.
-Nous voilà chez nous, nous voilà à la maison.
Sous nos pieds, un monde en feu et obsolète disparait peu à peu, notre amour suffit aujourd’hui.
Deux cadavres ont été découverts ce matin dans un appartement du centre-ville. Il s’agit apparemment de deux femmes, leur identité n’a pas encore été dévoilé. Les victimes ont été retrouvés enserrés l’une contre l’autre, main dans la main et il semblerait même, d’après le voisin qui aurait découvert le corps, qu’elles souriaient. La cause de la mort n’a pas été officiellement déclarée, mais il semblerait d’après les premières estimations, qu’elles soient mortes d’overdoses. Plus d’informations sur notre site internet.
Bonne lecture!!