Bonjour toustes,
J'ai attentivement lu tous vos messages, et je suis touchée de voir que ça a remué certain.es d'entre vous.
Pour répondre a vos questions, en vracs :
- les frais de banque sont arrondis au dessus. C'est le prix de la gestion de mon compte et de la CB.
- pour les chats : j'achète la nourriture en ligne, je m'organise pour profiter des promotions, j'achète en lot, c'est effectivement des croquettes vétérinaires. Le lapin mange du foin et des légumes frais (des poubelles ou achetés).
- je n'ai aucuns critères pour définir qui peut se servir avant moi.
Je ne possède pas ce que je trouve (c'est un choix personnel). Tu es là, tu en veux, peut importe que tu ais ou non mis les mains dans la crasse, tu te sers. Il y a des "régulier.es", bien habillé.es, bien coiffé.es, qui passent en coup de vent, prennent un bout de pain, trois légumes et au revoir. La vie des gens ne me regarde pas.
EDIT 2 : je souhaiterai ajouter que le groupe de personne avec lesquelles je fais les poubelles est ouvert, chacun est libre de venir, d'observer, de participer, de prendre... Ou pas. Je n'ai aucun droit de regard sur la manière dont chaque personne souhaite investir de l'énergie et la manière dont iel définit ses besoins.
- oui, je fais aussi parfois les poubelles de particuliers. C'est rare, et c'est plus par curiosité : " tiens, pourquoi il y a 3 poubelles qui débordent alors que d'habitude il n'y en a qu'une dans cette rue ? ".
Les gens qui déménagent abandonnent parfois beaucoup de choses. Des épices, des paquets de nourriture entamés mais encore sains, mais aussi des vêtements.
Un exemple, parmi les trouvailles exceptionnelles : 7-8 sacs de 150L rempli de vêtements. On s'est partagé les sacs pour trier/laver/plier les vêtements et ensuite les donner à une association locale qui revend les vêtements en état. (Oui, je me suis servie au passage).
- Faire les poubelles n'est pas réservé aux pauvres. Ta "classe sociale" ou tes revenues ne définissent pas ce a quoi tu as droit. Il faut a tout prix éviter ce raccourci " pauvres = poubelles " qui est horriblement restrictif. Un pauvre a tout autant droit qu'un riche à des légumes propres, frais, beaux, qui ne sont pas des rebus de la chaine de consommation, un pauvre a le droit à des produits bien conservé, sans aucun risque pour sa santé.
Où est la justesse dans l'idée de prioriser les personnes dans le besoin pour les produits moches, dont la qualité gustative est altéré, ou la qualité sanitaire est discutable ?
Pour ces produits que les "riches" ne veulent pas consommer alors qu'iels ont les moyens de les transformer pour les rendre beaux, qu'iels ont les moyens de les améliorer pour les rendre bons et qu'iels ont les moyens de se soigner (ou qu'iels ont un contexte favorable à une bonne santé/hygiène de vie) ?
Il faut penser au contexte local :
- là où j'habite, il y a des structures d’accueil qui qui sont en charge d'aider les personnes en difficultés financières, sociales, etc. C'est un métier, et ce n'est pas le mien. Il y a effectivement une organisation entre les grands magasins et ces structures, pour que les invendus qui rentrent dans les cases (hygiène, date de péremption, état, etc) puissent être valorisé. Donc les poubelles que je fais sont des produits qui ne sont pas redistribués/valorisés.
- certains "spots" de poubelles sont très prisés. Ce sont des secteurs où je ne vais jamais. D'abord parce que ça peut être dangereux : les gens peuvent se battre pour de la nourriture, c'est la réalité de la faim et de la pauvreté. Ensuite parce que je n'y ai pas ma place : de quel droit je peux venir m'imposer et demander a avoir une part de ces poubelles en particulier ?
D'autres spots sont au contraire très peu fréquenté : en plein centre ville, même de nuit avec les éclairages, impossible de faire les poubelles discrètement. C'est une honte que de devoir faire les poubelles pour survivre. La honte ne devrait pas être du côté de celleux qui les font, mais malheureusement, la honte n'a toujours pas changé de camps.
- faire les poubelles avec le sourire est un privilège. Je fais quand je veux, comme je veux, là où je veux. Je garde "ce que je veux", j'ai le temps de les faire, de transformer, mais aussi... Quand je rentre chez moi, je peux me laver, me sentir bien avec des vêtements propres et frais, je n'aurais pas froid si je me lave les cheveux en allant me coucher, je ne risque pas de tomber malade (de froid, ou à cause des produits périmés/mal conservés) et si jamais ça arrive je peux me soigner. J'ai le temps de transformer les légumes, j'ai l'espace de les stocker, j'ai un frigo, un congélateur, des bocaux que je peux remplir. Tout ça fait de moi quelqu'un d'aisé, de riche, de privilégié.
On est loin de la personne qui a faim, qui n'a pas d'argent, qui n'a pas de chauffage, qui économise sur tout (les lavages du linge, la température de l'eau de la douche, pour ne pas dire la douche tout court, sur la quantité de sel dans le plat, sur l'espace disponible pour avoir des stocks, les soins médicaux, etc).
Je suis très loin de la personne qui doit faire les poubelles pour survivre parce qu'il n'y a pas d'autres solutions pour manger.
Est-ce que ça veut dire que je "joue au pauvre" ? Peut-être. Je crois que avoir conscience de ma situation, de celles des autres, et chercher des moyens d'être à l'équilibre tend a faire pencher la réponse vers le non.
MAIS... Oui, tout le monde ne fait pas comme moi.
Sont-iels a blâmer parce qu'iels estiment que mettre les mains dans la saleté leurs donnent un droit sur ce qu'iels trouvent ? As-t-on un droit de regard sur leurs salaires, la gestion de leurs finances, leurs choix de vies ? Peut-on dire d'une personne qui décide d'être freegan et qui trouvent ses propres ressources en dehors du système qu'iel est égoiste, qu'iel vole le pain d'autrui alors que le pain est humide et moisi ?
Sont-iels responsables de la précarisation des personnes dans le besoin, qui conduit ces même personnes à faire les poubelles pour survivre ?
Merci aux personnes qui ont témoignés dans les commentaires, ça permet de pondérer cet article, de donner une texture à certaines interrogations, de rappeler combien le gaspillage est un sujet fort.
Et surtout de donner une place aux invisibles, en espérant ne pas avoir parlé à leurs place.
EDIT : corrections fautes d’orthographes
EDIT 2 : dans le texte.