Alors moi perso, je suis pas trop d'accord avec les avis de Kalindi sur les films mais comme le disait quelqu'un au début, c'est un genre de la critique ciné d'être hyper incendiaire, c'est vrai. J'aime pas trop ce style parce que ça me rappelle les parents élitistes et bourgeois de mes potes de collège à Paris, et les chroniqueurs radio qui venaient du même milieu (qui étaient parfois les parents en question d'ailleurs), mais c'est vrai que ça fait partie du plaisir des critiques je pense, en particulier en France, que d'être hyper catégorique. Donc pourquoi pas.
Par contre, c'est ce passage qui m'a gênée dans l'article :
Toutefois, ça n’est pas parce qu’un programme soulage l’âpreté du quotidien qu’il faut fermer les yeux sur ses défauts.
Et ils sont nombreux, les ratés du show Netflix.
Platitude totale des dialogues, personnages irrémédiablement creux, enjeux banals, le tout recouvert d’un vernis de mièvrerie : tout est infernal. Tout, du début à la fin en passant par le milieu, les articles élogieux, les interviews des acteurs, et les arguments des pro-Bridgerton, qui seraient prêts à manger du savon par morceaux de 10 grammes plutôt que d’admettre l’évidence : ce show est insipide.
En tant que grande fan de comédie romantique, je trouve assez surprenant qu'il n'y ait pas une réflexion plus large concernant les productions "pour femmes" avec un côté très girly, comme Madmoizelle peut le faire pour la télé réalité. Casser du sucre sur les films pour femmes en les traitant d'insipide, creux, mièvre, banal, raté, et autres adjectifs qu'on aime particulièrement accoler aux femmes, c'est aussi un grand classique de la critique ciné et ça me gêne de lire ça ici.
Quand je lisais les critiques dans les journaux quand j'étais au lycée ou que j'écoutais les émissions de radio dédiées, c'était TOUJOURS la même chose. Quand un bouquin racontait une histoire d'amour optimiste et comme le font souvent les romances, c'était toujours traité avec une immense condescendance par les critiques et exactement les mêmes qualificatifs "mièvre", "creux", "insipide". Encore plus que le bouquin était écrit par une femme. Il fallait que ce soit un peu glaucque, un peu dark, tragique, pour que l'histoire d'amour ait droit aux éloges des critiques. Les histoires qui permettaient au public féminin de sortir la tête d'un quotidien fatigant et morne pour observer des héroïnes vivre leur meilleure vie, c'était toujours vu comme mièvre
Et idem pour les comédies romantiques! Je ne me souviens pas D'UNE SEULE comédie romantique grand public encensée par des critiques ciné dans mon adolescence et mes années étudiantes, et encore moins des critiques masculins. Et à la limite, pourquoi si la critique avait été "il y a des passages problématiques comme cette intrigue raciste", mais non! C'était toujours parler de mièvrerie ou de cette idée qu'on donnait un modèle irréaliste aux femmes... et pourtant, parfois je sortais du ciné et j'avais adoré la comédie mièvre en question, elle m'avait redonné du soufle, inspirée!
Les critiques ne se demandaient jamais pourquoi ce genre pouvait à ce point plaire aux femmes, ou alors ils avaient des explications hyper condescendantes du genre "on leur fait croire que le Prince Charmant existe, c'est nocif". Personne ne se disait que peut-être que ces genres marchent si bien avec les femmes, d'abord parce que les auteurs sont très largement des femmes (c'est le cas pour Bridgerton) et que donc elles ont une approche de la romance qui parle plus aux attentes des femmes que beaucoup de couples de films/romans écrits par des hommes. Qu'aussi, les romances peignent un univers où l'héroïne finit toujours par triompher et obtenir tout ce dont elle rêve, que ce soit une vie heureuse via l'amour dans les romances à l'ancienne, mais aussi un job de rêve dans les romances plus modernes, le succès professionnel (même dans les romans de femmes anciens, voir les Quatre filles du Dr March où l'une des héroïnes devient écrivain à succès!), un accomplissement quelconque, etc. Dans un monde où les femmes se voient sans cesse mettre des barrières et galérer à accomplir leurs aspirations, ces univers sont hyper rassurants et optimistes.
Perso, j'ai toujours su que les comédies romantiques étaient complètement irréalistes, mais de voir ces univers dynamiques, joyeux, plein de sentiments positifs, ça me redonnait le moral et ça me reboostait sur mes propres objectifs par moment, même si mes objectifs étaient très différents de l'héroïne (ex: je n'ai jamais voulu devenir une journaliste de mode à succès, job de 50% des héroïnes de comédies romantiques des années 2000, et pourtant leur plan de carrière pouvait m'inspirer).
Donc perso, j'ai trouvé vraiment moyen les termes employés dans cet article, et particulièrement le passage qui était aussi beaucoup celui des critiques hommes de mon adolescence, qui laisse entendre que le public qui a aimé est un peu trop borné pour reconnaitre qu'en fait, comme moi critique bien plus intelligent j'ai su le remarquer, c'est objectivement nul. Franchement, ça me rappelle vraiment ces hommes snobs qui se moquaient des loisirs de femmes en avançant des arguments "techniques" et "objectifs" sur la qualité du loisir en question. Et si ça avait juste été une critique au vitriol sur la série en tant que telle comme le premier article, à la limite OK. Là le problème pour moi, c'est que le public est inclus dans la critique, on reconnait qu'un large public (majoritairement féminin) a aimé, mais c'est qu'il n'a pas de bons goûts.
Bref, voilà pourquoi cet article m'a plus dérangé que d'autres, même si d'habitude je peux réagir en mode "JE SUIS PAS D'ACCORD!!!!!!", mais c'est pas la même démarche.