Cette soirée... Je n'avais jamais vécu quoique ce soit d'équivalent.
A Solférino d'abord, le siège du PS. Dès 18h30, c'était bondé (au point qu'il n'y avait aucun réseau) Tout le monde savait que Hollande avait gagné. C'était une liesse indescriptible. Des chants, des cris, des rires. Je ne voyais rien de l'écran géant, mais ce n'était pas grave. Aux fenêtres des bureaux du PS, des personnes sortaient parfois pour lever le poing, montrer des panneaux de campagne, lancer des ballons... Quasiment personne à plus de 20 m de l'écran ne voyait quoi que ce soit, mais tout le monde s'en fichait. La joie d'être ensemble, même sans se connaître, le sentiment de vivre quelque chose qui ne se reproduirait peut-être pas... Tout cela compensait largement le fait d'être serrés, de ne rien voir et d'avoir moins d'infos que les gens derrière leur ordi.
Au moment du décompte, ça a été l'explosion. Des bouteilles de champagne (ou plus probablement de mousseux au vu de la concentration d'étudiants), des ballons, des hurlements.
Et surtout, un mouvement énorme. Des flux humains qui convergeaient vers le boulevard Saint Germain. On ne pouvait pas y résister, il fallait avancer, on ne contrôlait pas notre trajectoire.
On a marché de Solférino à Bastille (une grosse, grosse trotte qu'on n'aurait pas fait d'ordinaire), avec des centaines d'autres personnes. Tout le monde marchait en chantant, criant, dansant. Sur les trottoirs, les passants et les touristes prenaient des photos de ce cortège incongru. Les 45 mn de marche sont passées sans qu'on s'en rende compte, tout était assez irréel.
L'arrivée à Bastille a été un nouveau choc. Impossible de rentrer sur la place, à l'entrée d'un boulevard. Une foule, mais une foule... Et la colonne de Juillet, prise d'assaut, par des gens, des drapeaux, des fumigènes.
Partout, les drapeaux se mêlaient. Français, Européens, Front de Gauche, EELV, Egyptien, Libanais, Breton, Italien...
On a finalement réussi à se glisser dans la foule de la place. Et là, on a passé 4 heures assez irréelles à ne rien voir ni entendre précisément ce qui se passait sur la scène, mais sans que ça ne nous touche outre mesure. On était là, on chantait, on tentait de lire la retranscription des discours, on dansait sur la musique. Tout le monde avait l'air heureux, juste d'être là, tout simplement.
Quand Hollande est arrivé, tard, et qu'il a prononcé son discours, court, les acclamations couvraient le bruit,faible, de la sono. Et la Marseillaise... à en donner des frissons. La comparaison est certes bizarre, mais je n'avais jamais chanté la Marseillaise avec autant de personnes que dans un stade. Là, on était beaucoup plus nombreux, et tout le monde a chanté avec une telle ferveur! C'était émouvant.
Au moment de partir, il n'y avait plus de métro. Il a fallu marcher, longtemps. Encore une fois, ça n'était pas grave. Ca valait le coup.
Ce matin, quand j'ai vu les articles sur le rassemblement qui se concentraient autour de la présence de drapeaux étrangers (pour ne pas dire des pays arabes...), je me suis juste dit que ceux qui écrivaient ça n'avaient pas compris. Il n'avaient pas compris ce que le 6 mai à La Bastille avait été.