Vos poèmes/poètes préférés?

3 Juin 2009
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paris
J'adore Les Fleurs du Mal de Baudelaire, de manière générale, mais voici un de mes préférés

Élévation

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par delà le soleil, par delà les éthers,
Par delà les confins des sphères étoilées,

Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté.

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;
Va te purifier dans l'air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs lumineux et sereins;

Celui dont les pensées, comme les alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes!
 
C

Cloclo522

Guest
Je suis tombé follement amoureuse de ce poème depuis que je l'ai étudié au collège :jv: :

Liberté

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom

Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom

Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom

Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom

Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom

Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

Paul Eluard
 
  • Big up !
Réactions : Patate douce
26 Juillet 2013
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Mon préféré est Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale, de Boris Vian. À chaque lecture, il me transcende, c'est une merveille :

Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale
Ça sera par un soir horrible
Clair, chaud, parfumé, sensuel
Je mourrai d'un pourrissement
De certaines cellules peu connues
Je mourrai d'une jambe arrachée
Par un rat géant jailli d'un trou géant
Je mourrai de cent coupures
Le ciel sera tombé sur moi
Ça se brise comme une vitre lourde
Je mourrai d'un éclat de voix
Crevant mes oreilles
Je mourrai de blessures sourdes
Infligées à deux heures du matin
Par des tueurs indécis et chauves
Je mourrai sans m'apercevoir
Que je meurs, je mourrai
Enseveli sous les ruines sèches
De mille mètres de coton écroulé
Je mourrai noyé dans l'huile de vidange
Foulé aux pieds par des bêtes indifférentes
Et, juste après, par des bêtes différentes
Je mourrai nu, ou vêtu de toile rouge
Ou cousu dans un sac avec des lames de rasoir
Je mourrai peut-être sans m'en faire
Du vernis à ongles aux doigts de pied
Et des larmes plein les mains
Et des larmes plein les mains
Je mourrai quand on décollera
Mes paupières sous un soleil enragé
Quand on me dira lentement
Des méchancetés à l'oreille
Je mourrai de voir torturer des enfants
Et des hommes étonnés et blêmes
Je mourrai rongé vivant
Par des vers, je mourrai les
Mains attachées sous une cascade
Je mourrai brûlé dans un incendie triste
Je mourrai un peu, beaucoup,
Sans passion, mais avec intérêt
Et puis quand tout sera fini
Je mourrai.
 
Petit hommage à Robin Williams via le poème de Walt Whitman devenu célèbre grâce au cercle des poètes disparus :

O Capitaine! mon Capitaine! fini notre effrayant voyage,

Le bateau a tous écueils franchis, le prix que nous quêtions est gagné,
Proche est le port, j'entends les cloches, tout le monde qui exulte,
En suivant des yeux la ferme carène, l'audacieux et farouche navire ;
Mais ô cœur! Cœur! Cœur!
Oh ! Les gouttes rouges qui lentement tombent
Sur le pont où gît mon Capitaine,
Etendu mort et glacé.

O Capitaine! mon Capitaine! lève-toi et entends les cloches!
Lève-toi - c'est pour toi le drapeau hissé - pour toi le clairon vibrant,
Pour toi bouquets et couronnes enrubannés - pour toi les rives noires de monde,
Toi qu'appelle leur masse mouvante aux faces ardentes tournées vers toi;
Tiens, Capitaine! père chéri!
Je passe mon bras sous ta tête!
C'est quelque rêve que sur le pont,
Tu es étendu mort et glacé.

Mon Capitaine ne répond pas, pâles et immobiles sont ses lèvres,
Mon père ne sent pas mon bras, il n'a ni pulsation ni vouloir,
Le bateau sain et sauf est à l'ancre, sa traversée conclue et finie,
De l'effrayant voyage le bateau rentre vainqueur, but gagné;
O rives, Exultez, et sonnez, ô cloches !
Mais moi d'un pas accablé,
Je foule le pont où gît mon Capitaine,
Etendu mort et glacé.
 
9 Août 2014
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Mon poète préféré est sans aucun doute Paul Eluard, dont les poèmes ne me lassent pas et ne cessent de m'étonner.
J'aime aussi beaucoup Guillaume Apollinaire, ainsi que Charles Baudelaire, qui a été l'un des premiers poètes que j'ai lu et réellement apprécié.
 
M

Mordred

Guest
comme l'indique mon pseudo... rimbaud ! et au delà de tous ses poèmes connus, je voulais partager celui-ci que je trouve magnifiquement simple et magnifiquement beau :

Sensation

Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.
 
18 Août 2013
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J'adore les poèmes de Charles Baudelaire mais mon poème préféré reste Barbara de Jacques Prévert

Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
Épanouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.



Et Quand voulez vous que je couche avec vous d'Alfred de Musset qui me fait bien rire


Quand je mets à vos pieds un éternel hommage,
Voulez-vous qu'un instant je change de visage ?
Vous avez capturé les sentiments d'un cœur
Que pour vous adorer forma le créateur.
Je vous chéris, amour, et ma plume en délire
Couche sur le papier ce que je n'ose dire.
Avec soin de mes vers lisez les premiers mots :
Vous saurez quel remède apporter à mes maux.


coquin :troll:
 
S

Seih

Guest
Mes deux poètes préférés sont Baudelaire et Prévert, tout simplement. Je ne saurais même pas expliquer pourquoi et encore moins choisir le poème que je préfère car je les aimes tous. <3
 
Je rejoins la longue cohorte de celles et ceux qui vénèrent Jacques Prévert et Baudelaire. Mon chouchou reste et restera à jamais Prévert, vu que c'est le premier qui m'a marqué et qui m'a émerveillée quand j'étais petite, sous l'impulsion de mon père qui l'adore également (papa, je ne te remercierai jamais assez <3). Et mon poème préféré de lui, c'est celui-là :

Chant funèbre d'un représentant

Mouvement des navires
mouvement des marées

Tu t'étais fait attendre
pendant des jours entiers
A la porte du Sept
le garçon a frappé
il m'a donné la lettre
et puis tout a tourné

Mouvement des navires
mouvement des marées

J'avais le mal de mort
et sans même en mourir
comme d'autres le mal de mer
sans pouvoir le vomir
Rien qu'en voyant l'enveloppe
j'avais tout deviné
dans la lettre de ta sœur
ton sort était marqué

Mouvement des navires
mouvement des marées

Alors je suis sorti
sans même me laver
et puis j'ai remonté
la rue de la Gaîté
et dans l'avenue du Maine
j'ai pris un verre de rhum
et le patron m'a dit
histoire de rigoler
Le petit verre du condamné
Il ne croyait pas si bien dire
cet homme qui savait rire

Mouvement des navires
mouvement des marées

A la gare Montparnasse
la gare que tu aimais
j'ai pris un ticket de quai
Je suis resté longtemps
à errer dans la gare
et je ne pensais qu'à ta vie

Mouvement des navires
mouvement des marées

Colliers de coquillages
bals de Vaugirard et de Saint-Guénolé
et le pas de tes pieds
sur le sable mouillé
toujours je l'entendais
et les quais étaient balayés
à intervalles réguliers
par les feux du phare de Penmarch

Mouvement des navires
mouvement des marées

Ton sort c'était hier
le mien c'est pour demain
et ta robe neuve et rouge
quand tu l'enlevais
jamais je n'oublierai
tout ce que tu disais
toi qui souriait toujours
comme seul sourit l'amour
Tu vois c'est le rideau d'un théâtre
et j'espère que toujours le spectacle te plaira
quand le rideau se lèvera

Mouvement des navires
mouvement des marées

Fraises de Plougastel
crêpes de sarrasin
hier c'était hier
oh que serai-je demain

Mouvement des navires
mouvement des marées

Oh je ne vendrai plus
des souvenirs de vacances
des boîtes en coquillages
et des coquilles Saint-Jacques
le paysage dedans
Je vendrai des vieux sacs
je vendrai des cure-dents
horaire itinéraire
Finistère Finistère
tout ça c'est déchiré

Mouvement des navires
mouvement des marées


Et celui de Baudelaire que je préfère :

L'homme et la mer

Homme libre toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; ton contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
Se distrait quelque fois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes ;
Ô mer ! nul ne connait tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remords,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !
 
11 Janvier 2014
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364
Bon, je me lance. J'ai 3 poèmes que j'affectionne particulièrement !

Le premier est L'albatros de Baudelaire. J'aime tellement ce poeme qu'un de mes tatouages lui est dédié.... :)
Il a déjà été cité, mais je le remet pour la forme ! :d

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

À peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule!
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid!
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait!

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.


Le second est également de Baudelaire. Il s'agit d'A une passante. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai toujours été fasciné par ce poème.

À une passante

La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet ;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair… puis la nuit ! – Fugitive beauté
Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité ?

Ailleurs, bien loin d’ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais !



Enfin, le dernier, est un poème américain qui me prend aux tripes à chaque fois que je le lis ! Il est de Bukowski.
Voici le poème lu par son auteur :

En français, ça donne ça :

il y a dans mon coeur un oiseau bleu qui
veut sortir
mais je suis trop coriace pour lui,
je lui dis, reste là, je ne veux pas
qu’on te voie.

il y a dans mon coeur un oiseau bleu qui
veut sortir
mais je verse du whisky dessus et inhale
une bouffée de cigarette
et les tapins et les barmens
et les employés d’épicerie
ne savent pas
qu’il est
là.

il y a dans mon coeur un oiseau bleu qui
veut sortir
mais je suis trop coriace pour lui,
je lui dis,
tiens-toi tranquille, tu veux me fourrer dans le
pétrin ?
tu veux foutre en l’air mon
boulot ?
tu veux faire chuter les ventes de mes livres en
Europe ?

il y a dans mon coeur un oiseau bleu qui
veut sortir
mais je suis trop malin, je ne le laisse sortir
que de temps en temps la nuit
quand tout le monde dort
je lui dis, je sais que tu es là,
alors ne sois pas
triste.

puis je le remets,
mais il chante un peu
là-dedans, je ne le laisse pas tout à fait
mourir
et on dort ensemble comme
ça
liés par notre
pacte secret
et c’est assez beau
pour faire
pleurer un homme, mais
je ne pleure pas,
et vous ?

***
Charles Bukowski






Mon second poème est
 
21 Novembre 2014
40
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1 084
Paris
Je ne sais pas si quelqu'un l'a déjà cité ( je n'ai pas lu les 15 pages, j'avoue ! ) mais :
Invictus de William Ernest HENLEY
Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody, but unbow'd.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul.

... Et une de ses traductions littéraires en français :
Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière,

Dans de cruelles circonstances,
Je n’ai ni gémi ni pleuré,
Meurtri par cette existence,
Je suis debout bien que blessé,

En ce lieu de colère et de pleurs,
Se profile l’ombre de la mort,
Je ne sais ce que me réserve le sort,
Mais je suis et je resterai sans peur,

Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.
 
  • Big up !
Réactions : Juu83
J'ai commencé à lire de la poésie avec Verlaine et Baudelaire, mais celui que j'aime le plus, et vers qui je reviens toujours, c'est Louis Aragon. On m'a offert le Roman Inachevé très tôt, et je n'en suis jamais vraiment ressortie.

Il fait souvent des longs poèmes, et il a beaucoup travaillé la construction du vers et de la rime - à la suite d'Apollinaire qui voulait la renouveler en changeant les rimes masculines / féminines pour des rimes qui soient une alternance entre les unes finissant par une consonne et les autres par une voyelle (qu'il a continué d'appeler féminine et masculine), Aragon a décidé qu'il pouvait renvoyer la fin de la rime au début du vers suivant, et ainsi transformer à l'envi toutes les rimes masculines en rimes féminines.

Il a une façon de faire des vers qui est très construite et à la fois toute simple, on ne sent rien, rien de la contrainte qu'impose l'architecture du poème, rien de la rime et du rappel constant qu'elle entraîne, il rend le tout invisible. Ca semble toujours naturel.

La cour de l'hôpital était vide et voici
L'accoucheur devant moi sur le pas de la porte
Il me dit quelque chose et moi je balbutie

Je dis que ce remède à la fin je l'apporte
Le remède à la fin Docteur je l'ai trouvé
Il dit que c'est trop tard que Madeleine est morte

On aurait pu dit-il peut-être la sauver
L'enfant vivra La phlébite aujourd'hui c'est rare
Je regardais ses souliers noirs sur les pavés

La rareté du fait rendait à tous égards
L'événement plus tolérable au médecin
Il dit une fois de plus qu'il était trop tard

C'est un peu difficile de choisir un poème à montrer (ils sont tous très longs d'abord) et souvent ses recueils sont assez unis, dans le sens où chaque poème est partie d'un tout, et perd à être mis en avant tout seul. (Même les Strophes pour se souvenir, qui fait quand même un très bon exemple de ce qu'écrit Aragon.) Je ne sais pas, je l'aime bien, et j'aimerai bien écrire aussi bien qu'il le fait.

Un autre extrait, toujours du même livre.

J'ai vu ce couple au déclin du jour je ne sais dans quel quartier
Nous avions fait un détour au-dessus de Nice avec la voiture
La ville mauve en bas allumait peu à peu ses devantures
Ces enfants se tenaient par la main comme sur une peinture
Histoire de les regarder je me serais arrêté volontiers

Il n'y avait dans ce spectacle rien que de très ordinaire
Ils étaient seuls ils ne se parlaient pas ne bougeaient pas rêvant
Ils écoutaient leur coeur à distance et n'allaient point au-devant
La place était vide autour d'eux il n'y remuait que le vent
Et l'auto n'a pas ralenti Les phares sur les murs tournèrent

Tout le pêle-mêle de la Côte et les femmes qui parlent haut
Les motos dans la rue étroite et les oeillets chez les fleuristes
Les postes blancs d'essence au bord des routes remplaçant les Christs
L'agence immobilière avec son triste assortiment lettriste
Dans le va-et-vient le tohu-bohu le boucan le chaos

Les fruits confits et les tea-roms les autocars les antiquaires
Des gens d'ici des gens d'ailleurs qu'escomptent-ils qu'est-ce qu'ils croient
Ces trop beaux garçons des trottoirs ont l'oeil rond des oiseaux de proie
Qu'a fui ce gros homme blafard qu'il ait toujours l'air d'avoir froid
0 modernes Robert Macaire entre Rotterdam et Le Caire

Miramars et Bellavistas ce langage au goût des putains
Palais Louis quinze Immeubles peints Balcons d'azur à colonnettes
Beau monde où si tout est à vendre à des conditions honnêtes
C'est toujours service compris pour cet univers à sonnettes
Il suffit de deux enfants rencontrés et tout cela s'éteint




Et sinon, je redécouvre la poésie anglophone avec ma meilleure amie (qui fait un master d'anglais). J'avais beaucoup de mal avec les anglophones, jusqu'à ce que je trouve un recueil de poètes noirs américains, qui écrivent souvent très différemment de leurs compatriotes blancs. La poésie américaine est aussi très différente de la poésie anglaise, et plus jeune, plus récente. Et voilà, moi qui pensait ne jamais arriver à m'intéresser à la poésie dans cette langue, j'ai pu lire des poètes qui comptent maintenant parmis mes préférés. Langston Hughes, surtout.

(Je n'ai malheureusement aucune traduction à proposer ...)

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Et mon amie m'a cité deux ou trois poèmes de Marianne Moore, et il faut que je trouve un livre d'elle, c'est pas possible :cupidon:

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Enfin, voilà. Je voudrais bien trouver de belles traductions à montrer aux gens, aussi, même si la traduction c'est toujours difficile en poésie.
 

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