"où commence et où s'arrête la domestication" est une question qui est aussi largement posée dans la communauté scientifique. Je ne suis pas une grande fan d'éthologie et je n'y connais pas grand chose, alors je laisserai quelqu'un d'autre développer l'aspect comportement animal de la domestication...
par contre, je m'y connais un peu mieux en biologie, et parmi les topics que j'aime bien suivre de temps en temps, il y a la génétique. il faut savoir que dans le terme "domestication", il y a certes une histoire de relationnel entre l'homme et l'animal, mais il y a surtout une histoire de reproduction. bon gré mal gré, une espèce domestique, c'est une espèce que l'homme fait se reproduire... et le plus souvent, il ne reproduit pas n'importe quels animaux entre eux , mais ceux qui répondent le mieux à ses besoins du moment (esthétique, productivité, travail, résistance...).
Ce qu'on connaissait depuis longtemps, c'est que de manière surprenante, beaucoup d'espèces domestiquées ont des points communs entre elles, par rapport à leurs homologues sauvages. pourquoi les chiens, les chats, les vaches, les cochons etc domestiqués ont : des tâches blanches? des oreilles tombantes? des poils frisés? une multitude de couleurs toutes plus folles les unes que les autres? alors que les loups, les chats sauvages, les bovins sauvages etc forment des populations beaucoup plus homogènes?
à ce stade là on peut parler de sélection naturelle, d'adaptation, que les animaux sauvages qui n'ont pas les bonnes caractéristiques physiques se font manger ou n'arrive pas à se nourrir... par contre, ça ne répond pas à la question : pourquoi ces caractères apparaissent dans les espèces domestiquées aussi bien herbivores que carnivores? des ruminants et des monogastriques? quel est le point commun entre le chat noir et blanc et la vache noire et blanche? et comme toute chose qui soulève des questions a généralement un nom, on a appelé ce phénomène le syndrome de domestication.
et y a pas très longtemps, la publi date de 2014, il y a peut être une raison logique qui mettrait tout le monde d'accord... ils sont partis de ce constat : pendant l'embryogénèse, le système nerveux, les ganglions nerveux, les cellules de la glande médulosurrénale (là où on produit l'adrénaline, hormone du stress), les mélanocytes (qui produisent les pigments) entre autres dérivent des mêmes cellules souches, les cellules de la crête neurale.
l'hypothèse de ces messieurs serait la suivante : les hommes qui ont domestiqué les premiers représentant des actuelles espèces domestiques ont d'abord choisi les plus dociles... ceux qui craignaient le moins l'homme (jusque là, c'est plutôt logique). sauf qu'en sélectionnant ces individus, ils ont surement sélectionné sans le vouloir ceux dont les cellules de la crête neurale étaient moins performantes pendant l'embryogénèse, à cause de mutations diverses. non pas que ça fasse des animaux débiles... par contre, ça fait des animaux qui ont des glandes surrénales moins productrices d'adrénaline, donc moins fuyant, peureux. et puis avec des zones non pigmentées. ou des formes originales de machoire, d'oreille bref...
je ne vais pas tout détailler, mais si vous êtes motivées, vous pouvez lire l'article original ici :
http://www.genetics.org/content/197/3/795.full
tout ça pour dire que je trouve que c'est un peu réducteur d'assimiler nos animaux domestiques à des animaux sauvages captifs. car certes, ils vivent avec nous depuis leur naissance, et qu'on ne peut pas nier l'effet de l'acquis sur eux (d'ailleurs, vous avez bien compris que je ne place pas l'hérédité au dessus de tout hein? on me fait pas dire ce que je n'ai pas dit!!). mais il ne faut pas oublier que la plupart des animaux domestiques qui nous entourent héritent aussi des siècles de sélection sur leurs ancêtres.
et puis je trouvais l'article assez fifou alors ça me fait plaisir de le partager aussi ^^