@Poisson_ Je me pose souvent cette question aussi, et je pense que je vais redire des choses dites au-dessus, désolée...
Je pense que les raisons de l'augmentation du surpoids/de l'obésité sont multiples et très liées aux changements de nos sociétés sur le plan du mode de vie ou de la considération du poids en lui-même.
Au niveau de l'alimentation, je me demande si nous avons déjà connu une époque où manger est aussi éloigné de l'acte de se nourrir. Aujourd'hui, manger, c'est consommer un plaisir, une marque, une pub, un moment entre amis... Mais ce n'est plus tellement "alimentaire", au sens : apporter à son corps des nutriments lorsqu'il en réclame. Quand nous sommes dans une société où l'accès à la nourriture est aussi simple que de faire deux clics sur son téléphone ou trois pas dans la rue, il est donc simple de manger plus que de besoin, et c'est ce que l'économie de marché a bien compris, en prenant soin d'ajouter des tas d'ingrédients pernicieux aux produits pour s'assurer d'une consommation optimale. Les additifs, les conservateurs, les sucres ajoutés, associés aux matraquages publicitaires où les femmes sont au bord de l'orgasme en mangeant une cuillère de yaourt et les enfants ultra épanouis en mangeant leurs céréales 100% sucre si bonnes pour leur développement... Il y a de quoi perdre la tête.
La preuve, beaucoup de personnes ressentent le besoin de faire machine arrière et d'apprendre à nouveau à manger, en consultant des professionnels, en lisant les étiquettes, en consommant local, et je ne pense pas que c'était la préoccupation de nos grands parents.
Ce retour en arrière est louable, s'il n'accentuait pas un autre problème de notre société : la culpabilité de manger. Car si, dans un sens, on nous matraque d'informations pour nous pousser à manger, on nous matraque aussi d'informations pour nous faire comprendre que manger, c'est mal, surtout si cela s'associe à une prise de poids. Alors que le surpoids augmente, ce n'est pas pour cela qu'il devient plus acceptable dans nos représentations. Sans compter que si la population a envie de maigrir, cela ouvre de nombreuses opportunités de marché : les produits minceurs, les programmes de régimes, les salles de sport... Il y a donc des aliments sains, pas sains, selon quoi ? On ne sait même plus, faut regarder quelle mention sur l'étiquette déjà ? C'est quel jour le cheat meal où j'ai le droit de m'accorder ma pizza déjà ? C'est quel mot en -ate qu'il faut bannir de mon panier déjà ? Elle a dit quoi cette instagrammeuse sur le gluten déjà ? Ah, oh, merde, trop tard, par stress de bien manger, j'ai fini par exploser le camembert...
Et alors que tout le monde se plaint d'une augmentation inquiétante du surpoids et de l'obésité, personne n'est en capacité d'apporter de réponse aux personnes qui en souffrent et qui voudraient maigrir. Très sincèrement, j'ai fait le deuil de mes attentes envers le corps médical, car il est incapable de prendre en compte l'entièreté d'une personne dans la prise en charge de l'obésité et qu'il est sûrement à 5% de ses connaissances sur le sujet. Quand on tape "obesity" sur des sites scientifiques et que les seules réponses sont "bariatric chirurgy", c'est-à-dire un traitement symptomatique sans traitement "de source", on peut largement se demander ce qu'a branlé la science à ce propos depuis des décennies. Mais cela n'est pas étonnant, quand on voit l'incapacité du corps médical à prendre correctement en charge les personnes obèses sur divers sujets, aveuglé par la grossophobie et mettant en danger ces personnes quand il ne les insulte pas directement. Il y a nombre de femmes qui se sont vu refuser des moyens de contraception, refuser des examens, mal diagnostiquées... C'est aberrant et alarmant, pour une discipline "si inquiète".
Dès lors, au milieu de toutes ces injonctions contradictoires, il ne reste qu'un énorme flou qui peut empêcher les personnes en surpoids/obèses de se comprendre, de s'accepter et de savoir quoi faire. Lorsqu'on veut réellement maigrir, il est difficile de trouver un vrai recours, et c'est ainsi que des programmes dangereux voient leur chiffre d'affaire décuplé grâce à des inscriptions en masse de personnes à qui l'on a répété que leur corps était un défaut. S'accepter comme l'on est et envoyer bouler l'envie de maigrir parce que la société est grossophobe, mais mettre de côté tous les questionnements sur les conséquences du poids sur la santé ? Se lancer dans une démarche d'amaigrissement, et accorder sa confiance à diverses théories en prenant le risque d'être déçue du résultat et de sombrer dans un manque de confiance en soi encore plus grave ? Et lorsqu'on ne veut pas maigrir, olala, la pente est encore plus glissante... C'est presque un acte de résistance digne de 39-45, à se justifier des tonnes de fois face à des experts nutritionnistes du dimanche, prêts à te vendre le super régime Weight Watchers qui a super bien marché pour eux en 2003, mais que jusqu'en 2004 hein, parce qu'ils ont repris tous leurs kilos, même plus de kilos, mais franchement crois-moi c'était super ce système de points qui te donne le droit de te nourrir seulement si tu pèses tous les ingrédients que tu veux ingurgiter au gramme près ! Quoi ? Ça ressemble à ce que fait une personne avec des TCA ? Attendez...
Pardon, je m'emballe
J'ai fini par écrire des tas de lignes alors que je voulais juste être claire avec mes idées
(qui sont les miennes, 100% non scientifiques, 100% liées à mon histoire). Ce sujet me fout toujours gros sur la patate. Très sincèrement, j'en viens à l'idée que la maladie (s'il faut l'appeler comme ça !), c'est la société toute entière qui la porte et qui, le cas échéant, devrait se soigner.