Je ne supporte pas les périodes où je me sens molle intellectuellement.
Ça m'est arrivé jeudi soir : j'écoutais une fille parler de Sparte et de la Grèce Antique avec passion, j'avais envie de rebondir sur tout ce qu'elle disait, mais je n'avais rien d'intelligent à ajouter à son récit. Pourtant, fût un temps, j'avais beaucoup de connaissances sur le sujet... Mais aujourd'hui je n'ai plus que quelques bribes de souvenirs, je me souviens des blagues de mon prof d'hypokhâgne mais j'ai oublié la substance de son cours. Je m'en suis voulu de ne pas avoir entretenu cette culture, de ne pas avoir continué à m'intéresser à cette période qui m'a passionnée pourtant quand je l'avais étudiée. Je m'en veux d'avoir laissé tout ça me glisser entre les mains. Certains ont honte quand ils lisent ce qu'ils ont écrit ou qu'ils repensent à ce qu'ils ont pu faire, moi c'est plus souvent l'inverse, je me dis que je suis plutôt fière de ce que j'ai pu faire avant, et j'ai l'impression de passer mon temps à « régresser », comme si je ne m'intéressais plus à rien de « noble ». J'admire les gens qui s'élèvent par leurs pratiques, ceux qui prennent l'initiative de lire, de regarder des reportages... D'autant plus qu'une fois que tu te lances là-dedans, c'est un plaisir. Et je le sais puisqu'il y a eu des périodes où je me sentais en ébullition, où j'avais l'impression d'apprendre plein de choses. Je me sentais « stimulée » intellectuellement quand je regardais plusieurs films par jour par exemple. À l'époque, je me posais, je regardais des « bons » films, je pleurais, je riais, et ensuite je pratiquais mon petit rituel : j'allais sur allociné, je mettais une note, souvent une critique, je lisais les avis des autres, et j'allais me coucher avec un film de plus à la vidéothèque de mon cerveau
. J'étais trop bien : je me sentais nourrie par le double plaisir d'apprendre et de me divertir...
Aujourd'hui j'ai juste l'impression d'être une larve qui se laisse vivre et qui oublie (ou laisse à la dérive) tout ce qu'elle a su, qui n'a pas de passion et qui reste dans un état de passivité culturelle, qui se nourrit à la télé-réalité et aux bières (quel portrait ragoutant
). Tout ça parce que le flegme est plus facile à entretenir. En plus, je me repose sur le fait que j'ai de bons résultats scolaires et qu'on me considère comme quelqu'un de pas trop bête, comme si j'avais rempli mon quota, comme si la culture n'était qu'un plus, alors que c'est pourtant un truc que j'adore et pas une contrainte. En plus, certes on se cultive pour accroitre nos sujets de conversation, mais on se cultive aussi beaucoup pour nous. Pour notre plaisir personnel, le plaisir d'apprendre, de lire, d'écouter une musique ou de regarder un film. Pour la jouissance de sentir gonfler nos connaissances, de joindre l'intelligent à l'agréable... J'aimerais beaucoup avoir un déclic et me remettre à tout ça. J'adore la période estivale, mais cette année j'ai l'impression que l'été, ses sorties, sa chaleur et ses téléréalités ne font qu'augmenter ma léthargie intellectuelle.