C'est intéressant de lire cet échange.
Pour ma part, je pense que j'aurais eu une réaction plus radicale suite au premier tour. Si une personne de mon entourage avait choisi de porter Le Pen au second tour, next sans chercher à comprendre. Sans ghoster mais en le lui disant clairement, parce que je ne comprends pas (et je ne pense pas avoir envie de comprendre) comment on peut ne pas savoir assumer ses actes/ses prises de position à ce point passé un certain âge. Si une personne de mon entourage avait choisi de porter Macron au second tour, j'aurais jugé très fort et j'aurais eu besoin de prendre mes distances quelques temps. Quand on vote pour un•e candidat•e dès le premier tour, ça relève de l'adhésion à mon sens. Ça veut dire qu'on
cautionne les violences de l'un ou de l'autre (non, je ne les mets pas au même niveau, mais c'est totalement contreproductif et dangereux de fermer les yeux sur celles de Macron en réponse). Ou qu'en tout cas, elles nous paraissent suffisamment négligeables pour mettre ce bulletin dans l'urne. Dans un cas je ne le conçois pas donc j'aurais coupé les ponts ; dans l'autre j'aurais franchement du mal, mais sans aller jusque là. En fait, j'éprouve toujours énormément d'aigreur envers celleux qui ont rendu ce second tour possible et qui ont voté pour ces 2 candidats, donc savoir qu'il y en a parmi mon petit "cercle de confiance" passerait très moyennement, voire pas du tout dans le cas du RN.
Je ne sais pas ce que mon entourage vote et, comme quelqu'un le disait au dessus, ça ne m'intéresse pas. (Sauf le soir du 10 avril où tout le monde était sous le choc, a un peu oublié ses principes et s'est envoyé des messages de dépit en mode "c'est mort, aucun des 2, je vote pas".)
Les isoloirs sont faits pour éviter ce genre d'incidents diplomatiques, mais j'estime que ça ne me regarde tout simplement pas (et inversement, qui j'élis ne les regarde pas). Je ne suis pas une personne extrêmement politisée, je m'y intéresse sans en faire une pierre angulaire de ma vie ou de mes interactions. C'est important, mais sans plus au quotidien, et j'avoue que j'ai du mal avec ce côté "tout est politique" (sûrement à tort, j'en ai conscience, mais les réactions de certaines personnes sous couvert de ça m'agacent parfois de façon épidermique). Ça me suffit de savoir qu'on partage un socle de valeurs commun. Ça ne me dérange pas qu'on ait des opinions très diversifiées, voire paradoxales, sur certains sujets précis, mais comme les Xphobies ne sont pas des opinions, ça règle assez vite le problème selon moi
Concernant le second tour, j'aurais un avis un peu plus nuancé. Il s'agissait, pour beaucoup, de voter "contre" l'un des 2 candidats (ou les 2, si comme moi on a voté blanc). Pour beaucoup, l'enjeu se résumait à éviter une présidence Le Pen ou éviter une réélection de Macron. Ni plus ni moins. Face à un vote Macron, j'aurais réagi de manière bien plus bienveillante qu'au premier tour. Face à un vote Le Pen, sans doute un tout petit peu plus aussi. Si un•e proche m'avait dit vouloir voter RN/venait me dire après coup qu'iel l'avait fait, je ne sais pas si j'irai jusqu'à couper les ponts radicalement. Là aussi j'aurais besoin d'une certaine distance, de limiter les interactions pendant un temps, mais je trouverai plus constructif de dialoguer avec la personne en question. Sans doute parce que je sais que, connaissant les gens qui m'entourent et leur positionnement global, ce ne serait pas un vote d'adhésion. Je ne trouve pas ça logique/cohérent/particulièrement excusable, mais j'essaierai de comprendre ce qui s'est passé (justifier n'est pas excuser), pourquoi iel pensait devoir faire ce choix plutôt que voter blanc/ne pas voter, lui mettre un peu le nez dans son caca en lui envoyant des liens pour lui rappeler ce qu'est réellement le RN et MLP derrière son image policée.
Personnellement, je ne perds pas non plus de vue d'où je pars. Ado et jeune adulte, j'ai parfois eu des sorties racistes (enfin, c'étaient des stéréotypes/clichés/paroles ou questions que je pensais au contraire très bienveillants et que je n'imaginais pas blessants), des attitudes ou des propos
très misogynes (avoir un vagin n'est pas incompatible avec ça), des réflexions teintées de grossophobie. Si les gens s'étaient mis à me ghoster au lieu de me reprendre, de mettre en lumière ce qu'il y avait de problématique dans mon action ou de me dire frontalement que je pensais de la merde, je n'aurais pas évolué. Tout comme, sur des problématiques qui me tiennent à cœur et me concernent plus ou moins directement, je fais une nette différence entre un truc dit par maladresse, incompréhension, influence via de fausses représentations véhiculées ou manque d'info et un autre dit par franche conviction/refus de s'informer, de comprendre. Je ne couperai jamais les ponts dans le premier cas, même si les propos me déplaisent sur le moment. Personne n'est né en étant un exemple de déconstruction ou de comportements tout à fait safe (d'ailleurs, personne ne l'est à 100%, malgré ce qu'on veut bien se raconter), ça se construit entre autres par des échanges, des prises de conscience, des électrochocs. Je sors un peu du cadre du sujet de l'élection, mais pas tant que ça. Tout est à remettre dans son contexte au cas par cas.
J'ajoute aussi que je trouve assez dangereux d'isoler, stigmatiser ou exclure une personne qui aurait voté MLP par colère/désespoir/sentiment de solitude vis à vis des institutions en occultant tout ce qu'elle peut avoir de nauséabond. Parce que je me dis que, dans certains cas, c'est le meilleur moyen d'inviter cette personne à se... radicaliser, et qu'on participe peut-être à créer ce qu'on veut justement éviter. Cela dit, je comprends aussi les gens qui ne peuvent pas du tout composer avec ça, viscéralement.