Je viens d'apprendre qu'une personne qui m'est très chère a été diagnostiquée comme ayant un cancer du sein.
Cette femme est comme une mère pour moi, elle m'a ramassé à la petite cuillère quand j'étais démolie, elle m'a redonné confiance en l'humanité. Elle a été mieux qu'une mère en fait, elle m'a donné tout ce qu'une mère a à offrir : réconfort, protection, et même des câlins et des bisous sur le front avant de se coucher. On restait debout jusque 2 ou 3h du matin, à discuter, à rire, à chanter, moi, elle, ma "soeur" de l'époque, son mari, et leurs enfants aussi parfois.
Une fois, on rentrait du marché et sa chanson préférée est passée à la radio. Alors on a arrêté la voiture devant la maison et on est restés dedans, à chanter en coeur, c'était un des meilleurs moments de ma vie, si ce n'est le meilleur. Je me souviens des fou-rires à deux heures du mat, en regardant une version hilarante de Robin des Bois. Je me souviens de mon émotion quand elle nous a dit, à ma 'soeur' et moi, que c'était la première fois qu'elle voyait ses enfants sortir de leur chambre et discuter avec d'autres gens. Elle disait que nous avions le don de savoir quand parler et quand se taire, que c'était reposant, qu'on avait une très bonne influence sur ses enfants.
Je me souviens quand on allait boire un verre à Kuching, tous ensemble. Son mari qui se faisait draguer par les serveurs, c'était trop drôle... Ca doit être terrible pour eux en ce moment. Mais je suis heureuse qu'elle l'ait lui à ses côtés. Il l'aime, c'est juste trop beau à voir.
Je me suis rarement attachée aussi fort à quelqu'un en aussi peu de temps, et là, bam, cancer.
Je pourrais jamais lui exprimer à quel point elle compte pour moi. Elle a rendu toutes les merdes que j'ai vécu supportables et même bénéfiques, puisqu'elles m'ont mené jusqu'à elle et sa famille.
Je retourne passer quelques jours chez eux ce mois de juillet, et elle m'a envoyé un mail me dressant un peu le tableau pour pas que j'ai la surprise en arrivant.
"Please don't worry". Ouais. Je peux faire semblant, mais rien que le fait que quelque chose de mauvais ait pu s'approcher d'eux, c'est comme si on m'arrachait les entrailles. J'ai un espèce de vide engourdi derrière ma cage thoracique, et j'ai les joues qui brûlent à force de pleurer. Et j'ai personne à qui en parler.
Je sais pas ce que je dois faire, je sais pas quoi lui dire, j'ai personne à prier.
Comment on répond à ce genre de mail? "I hope you don't die"?
Je devrais peut-être le dire à la fille avec qui j'ai été hébergée chez eux (ma "soeur" )... mais est-ce à moi de le dire? Je suis sûre qu'elle voudrait le savoir, elle m'en voudrait de garder ça pour moi, cette femme a autant d'importance pour elle que pour moi, mais est-ce que notre ex-mère d'accueil ne préférerait pas lui dire elle-même, quand elle l'aura décidé?
Putain je sais pas quoi faire, c'est trop gros pour moi. C'est trop gros pour moi, je veux pas qu'elle souffre, je veux pas qu'ils souffrent, je veux pas que le mal les atteigne, je veux pas qu'elle meurt, et je peux rien y faire.
Je sais pas quoi faire. Y a rien à faire.