@Liza Radley ce qu'on voit justement avec cette attaque, c'est que l'Islam est bien éloigné des motivations du tueur (et n'oublions pas que dans les équations funèbres des attentats partout dans le monde, il y a infiniment plus de victimes musulmanes que de tueurs musulmans), et qu'il s'agit à mon avis bien plus
d'un opportunisme des deux côtés : du côté du tueur, de donner un sens à son suicide, du côté d'ISIL, de marquer une nouvelle "victoire" (qui n'en est pas une).
Tu dis que l'Islam a une histoire de violences, et qu'elle a une histoire de conquête de l'Europe. En l'occurence le troupeau d'éléphant se réduit à crottes de souris quand on estime le nombre d'individus qui sont dans cette optique. Quel-le-s musulman-es, aujourd'hui, veulent conquerir l'Europe ?
Même ISIL, l'ennemi ultime, n'est pas dans cette optique, bien plus occupée à blesser l'Occident, à établir un caliphat entre la Syrie et l'Irak, et à recruter en se basant sur le récit des atrocités commises par l'Occident au Moyen Orient. Le Grand Remplacement n'existe que dans les fantasmes de notre extrême-droite, tant par le nombre de musulmans en France, le taux de conversion,
ou l'inaudiblité (ça se dit, j'ai vérifié) de l'Islam politique (faut il rappeler que l'un des sujets favoris de nos médias et politiques c'est comment faire peur avec l'Islam, pour nous détourner des enjeux sociaux, politiques et écologiques ?). L'Islam, comme toutes les religions (y compris le boudhisme), a une histoire de violences, mais comme le dit
@madmoizelle N, c'est aussi le cas de notre pays,
et dans une histoire bien plus récente. Même notre propre pop culture, et la pop culture importée des EtatsUnis, valorise la violence : pourquoi l'Islam serait alors un cas particulier ? Pourquoi le réflexe est de sauter sur l'Islam plutôt que de sauter sur la nationalité française ou le fait que le tueur avait une carte de séjour française ? Puisque la France a une histoire de violence très récente ? Toute la réflexion sur la couleur de peau des tueurs qui les classerait dans la case terroriste ou "désaxé" est d'ailleurs bien sur cette question : un homme blanc qui tue des hommes et des femmes noir-e-s dans une église américaine,
c'est un désaxé, un homme blanc qui tue 150 personnes en avion,
c'est un dépressif, mais un arabe qui fonce en camion dans la foule,
c'est un nouveau signe que l'Islam est violent. Pourquoi cette différence de traitement ? Pourquoi chercher l'arabe et non le français, ou l'homme cis (puisque ce sont les hommes qui tuent dans ces attaques, qu'elles soit ou non qualifiées "d'attentat terroriste", dans le tueur ?
Tu dis aussi que le relativisme moral est ambiant. Je te rassure, et les polémiques récurrentes sur le voile nous le montrent bien : l'universalisme façon "La France, pays des Lumières", et surtout façon néocolonial,
est bien vivant dans notre société. Les valeurs perçues comme Françaises sont brandies en étendard, là sous le slogan "Je Suis Charlie", là sous le hashtag "#JeSuisEnTerrasse". Je dirais même qu'on est dans un "inverse" du relativisme culturel ou moral : non seulement les arabes et les noirs (dont on percevrait ou projetterai une culture différente de la culture "française") doivent se conformer aux valeurs de la République (le féminisme -surtout quand c'est pour taper sur les racisés-, la laïcité, la liberté d'expression), mais plus que tous les autres,
ils devront être exemplaires et toujours reconnaissants de ce que la France a fait pour eux. Un blanc qui salue différemment les hommes et les femmes, ça passe. Un arabe qui salue différemment les hommes et les femmes, c'est inacceptable. Un blanc qui ne respecte pas la minute de silence, ça passe. Un arabe qui ne respecte pas la minute de silence, c'est une défiance à l'encontre de la France. Une arabe qui revendique de porter le voile, c'est une insulte aux valeurs de la France. Un noir qui veut lutter contre la négrophobie, c'est un communautariste. Etc etc. Tout ça pour dire que de mon point de vue on est bien plus
dans une survivance de l'esprit colonial français, façon "aidons ces gens à se sortir de leur condition, par la force si il le faut", et façon "tout refus de voir le monde d'une autre façon que Nous est une menace pour la République Française", que dans un relativisme moral installé, qui passerait tout à tout le monde. Une culture perçue ou projetée comme "différente" n'étant donc pas une excuse, un levier pour le relativisme moral mais au contraire un handicap, en particulier dans l'exigence d'exemplarité.