@Chat-au-Chocolat dans le cas d'un cancer incurable et générant des douleurs insoutenables, je trouve en effet que ça serait justifié de disposer de l'option de l'euthanasie, je n'ai jamais dit le contraire. Par contre, parmi les précédents messages sur ce topic, il y en avait quand même beaucoup qui évoquaient plutôt des situations de handicap ou de perte d'autonomie liée à la vieillesse par exemple. Et c'est là qu'il faut être très vigilant dans son discours je trouve.
Par exemple quand tu dis dans un autre post
La "vie", c'est pas être coincé dans son corps à ne rien pouvoir faire d'autre qu'avaler des aliments par une sonde et cligner des yeux. Enfin en tout cas, si c'est la conception de la vie qu'ont certaines personnes, on n'a clairement pas la même.
J'ai envie de te demander de quel droit tu décrètes que telle ou telle vie ne mérite pas d'être vécue? En plus quelques lignes plus haut tu dis aussi "Qui est-on pour décider du sort des autres ?". Donc je te retourne la question : qui es-tu pour décider qu'il vaut mieux mourir que de vivre paralysé? Qu'on s'entende hein, une vie de ce genre, je ne la souhaite ni pour moi, ni pour personne. Cela étant, je ne m'aventurerais pas à affirmer que je demanderais l'euthanasie si je me retrouvais dans un état de locked-in syndrome (LIS), parce que c'est une chose de se projeter dans cette situation d'un point de vue de personne valide, c'en est une autre de le vivre réellement. A première vue on pourrait imaginer que le locked-in syndrome c'est la fin de tout, que la conscience sans la possibilité d'agir physiquement ou de mobiliser ses sens ne sert à rien, et pourtant, même dans ce que beaucoup de gens décriraient comme un état végétatif (ou plus vulgairement appelleraient "légume"), tu as des cas qui prouvent que la créativité est encore possible. Par exemple le journaliste Jean-Dominique Bauby qui a réussi à écrire
Le scaphandre et le papillon en dictant le livre par des mouvements de paupière. Bien évidemment c'est une exception qui n'est certainement pas représentative de l'ensemble des patients LIS, mais je trouve qu'elle invite quand même à s'interroger sur les préconceptions qu'on peut avoir de cet état. Tu as peut-être des gens qui même en ayant perdu toute faculté de mouvement et de parole et même en étant en mesure de choisir l'euthanasie, préféreront se raccrocher à des moyens de communication extrêmement ténus pour rester en lien avec leurs proches, profiter des sens qui leur restent, éventuellement exercer leur créativité, etc. Quand tu dis "Le but de la vie c'est pas juste d'être physiquement là, c'est aussi d'en retirer un gain/un plaisir/appelle ça comme tu veux." peut-être que c'est toi qui sacralises une certaine vision de la vie, quitte à ignorer ou mépriser d'autres conceptions qui ne cadrent pas avec ton idéal.
En attendant, ce genre de point de vue ça contribue au contexte que je dénonçais précédemment et qui à mon avis pourrait interférer dans la liberté de choix les patients si, comme certains valides le souhaitent, on ouvrait l'euthanasie à certains handicaps lourds, et aux gens très âgés et/ou pas autonomes. La citation suivante, au sujet du suicide institutionnel chez les Inuits, résume très bien ma pensée :
Se pose ici tout le problème éthique de la liberté du suicidant et de la libre décision et exécution du suicide assisté dans les suicides institutionnels. La liberté ne peut être appréciée à sa juste mesure qu’en la situant à l’intérieur de la conjoncture culturelle d’un groupe donné et qu’en tenant compte des rapports culturels spécifiques entre la liberté individuelle et la liberté collective. (
source).
Vu la mauvaise prise en charge de la vieillesse et du handicap en France + la vision qu'on en a et qui est intériorisée par les personnes dépendantes elles-mêmes, est-ce que le choix de l'euthanasie serait réellement libre si elle était légalisée pour les cas de LIS par exemple ? (ou pour tout autre cas de grande dépendance à une aide extérieure).
Le but de la légalisation de l'euthanasie, c'est de laisser chacun choisir en son âme et conscience, tout en proposant (je le souligne encore une fois, car tu oublies cet élément essentiel dans ton message) un encadrement légal.
Je ne comprends pas ce reproche, ou alors tu n'as pas lu mon dernier post jusqu'à la fin? Bien sûr que j'ai ce cadre légal en tête, puisqu'à mon avis, tout l'enjeu, ça serait de le construire de façon à se prémunir contre certaines visions du handicap et de la dépendance qui ont été relayées ici.
Pour le reste de ton post, je trouve que tu caricatures beaucoup mes idées alors qu'il me semble avoir fait un effort de nuance, donc un peu la flemme de continuer à argumenter.