@Asli
On peut avoir de l'empathie pour tout le monde. Policier ou manifestant. Je ne pense pas qu'on ait un stock limité d'empathie ou que celle-ci ne soit valable que pour certaines personnes et pas d'autres. En tout cas, je ne fonctionne pas comme cela.
Après, je veux bien te croire quand tu dis que tu ne connais personne qui a subi des violences policières. Moi-même je ne connais personne dans mon cercle social. Mais il n'y a pas besoin de connaître personnellement pour constater des faits. Et c'est dommage que tu te fermes à tout témoignages de ces violences, que ça ne te touche pas (en tout cas, c'est l'impression que cela donne). De rester sourd à des choses qui sont inadmissibles (les personnes qui sont censées assurer notre sécurité et qui s'assurent de faire respecter les loi ne doivent pas être celles qui nous violentent, et qui outrepassent les lois), à des injustices, c'est un peu comme se fermer à une part d'humanité...
Sinon, je te vois mentionner la voiture de police brûlée. Encore une fois, il ne faut pas prendre les choses individuellement. Tout ce mouvement de contestation et à prendre de manière plus globale, sociologique. J'ai récemment lu un article que je trouve très éclairant justement, qui parle de ces gens qui "cassent" et qui explique pourquoi. Je mets ici un assez gros extrait :
Manipulations et irresponsabilités à propos des "événements" de Rennes
Ça ressemble quand même beaucoup à un message politique cohérent :
on attaque les institutions (police, mairie, parti au pouvoir) qui favorisent et protègent les acteurs et les méthodes du grand capital financier (banques, multinationales, attributs de luxe et de richesse) au détriment du peuple de plus en plus asservi et appauvri. Il faut être complètement aveuglé par l’idéologie pour ne pas comprendre ce message ou bien être d’une malhonnêteté intellectuelle éhontée pour faire passer ces évènements pour de la « casse pour casser » (on ne peut pas supposer la stupidité).
C’est plutôt un message adressé par des jeunes désespérés face au monde inique qu’on leur laisse et pire encore qu’on leur prépare pour l’avenir avec, entre autres, la loi si symbolique dite « El Khomri » que le pouvoir impose par la force. Action sans doute vaine et contre productive, action tombée dans le piège tendu par les « décideurs » qui suscitent et laissent faire, mais
action qui s’adresse clairement à celles et ceux, qui, de la maire de Rennes au ministre de l’intérieur venu le 16 mai féliciter les forces d’un certain ordre pour leur travail (lequel? celui d’avoir laissé casser des vitrines et gazer des gens qui n’avaient rien à voir avec ça ?), en passant par le préfet,
ne veulent rien entendre, rien comprendre, rien discuter et vont donc empirer la situation.
Car en effet à prendre les gens pour des imbéciles (« la gauche archaïque, les casseurs pour casser »), à les tromper (« mon ennemi, c’est la finance »), à les exploiter de plus en plus (lois Macron et El Khomri entre autres),
à clamer que les valeurs de la République sont « Liberté, égalité, Fraternité » alors qu’elles ressemblent plutôt dans les faits à « Autorité, Inégalité, Cupidité », à privilégier le nationalisme et l’égoïsme plutôt que l’humanisme et la justice, à donner comme exemple de véritables comportements de voyous (grands patrons, ministres, violences policières, entre autres) qui ne proposent que le mensonge, la tromperie, le vol, la casse humaine et sociale, la violence symbolique et physique comme modèles que, du coup, ils légitiment...
à faire tout ça on provoque la colère et la révolte, le désespoir et la violence. Et
au lieu de l’écouter, de comprendre qu’on est allé trop loin, de passer par le dialogue et l’équilibre pour retrouver l’apaisement, on enfonce le clou, en tapant dessus comme une brute parce qu’on croit qu’en tapant sur la soupape de la cocotte-minute on arrêtera la montée de la pression : elle finira au contraire par exploser.
Un chauffeur de taxi me disait il n’y a pas longtemps en parlant des riches et des puissants, des politiques et des grands patrons, « ils finiront avec la tête au bout d’une pique ». Son hypothèse, au moins comme métaphore, n’est pas improbable : à force de tirer sur la corde, elle pètera et le retour de manivelle sera violent.
Les irresponsables qui continuent à tirer sur la corde avec toute leur arrogance, leur mépris, leur cynisme, leur aveuglement ou leur bêtise, dans tous les cas
leur inhumanité et leur incapacité à envisager une société de liberté, d’égalité et de fraternité où bien sûr ils perdraient beaucoup, sont bien plus inquiétants pour l’avenir que quelques dizaines de jeunes exaspérés qui, parce qu’on ne leur propose aucune autre issue que le servage dans une société immorale, cassent les vitrines de quelques banques riches à milliards et de boutiques de luxes bien assurées. [...]
La violence des dominés continuera tant qu’on lui répondra et qu’on la causera par davantage de violence des dominants, violence physique ou symbolique. La répression la contiendra peut-être un certain temps parce que les dominants ont un arsenal plus puissant à leur disposition. Mais plus de violence produira toujours plus de violence dans un cercle vicieux sans issue, avec son cortège de souffrances, de destructions, de déchéance insupportable de la dignité humaine. Est-ce que c’est vraiment ça qu’on veut ? Il est vrai que l’idéologie néo- et parfois vaguement socio-libérale, régnant depuis trente ans, pense la société comme une jungle où la sauvagerie des rapports de force fait office de relations humaines.
Ça s’appelle la « loi du marché », comprenez : les plus riches et les plus puissants imposent leur loi à leur bénéfice. Au train où va ce monde de fous, aux mains de ces irresponsables inhumains et asociaux, de ces arrogants guidés par leur avidité et par la croyance en leur supériorité, il explosera un jour et plus aucune répression ne l’arrêtera. Les évènements de Rennes n’en sont que des avant signes parmi d’autres.
Une seule solution pour arrêter fondamentalement les violences : penser et mettre en place un autre monde dont les valeurs cardinales seraient pour de bon les Droits Humains. Et pour cette seule fois, c’est vrai, on n’a pas le choix.
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Pour finir, une autre citation que je trouve très importante "
Car "révolution" n'est pas un mot dans nos bouche mais un feu dans nos cœurs"
"S’il y a une question qui devrait occuper toutes nos discussions et solliciter toute notre intelligence, c’est de savoir comment nous allons réussir à renverser ce qui nous gouverne une fois pour toutes. Cette visée, au reste, est partagée par le plus sauvage des émeutiers comme par le plus pacifiste des votants de Nuit debout, quel que soit le désaccord sur les moyens à employer."