T'as fait/ tu veux faire une prépa ? Pour quelles raisons ?
J'ai fait une hypokhâgne et une khâgne B/L (lettres et sciences sociales, pour celles qui ne connaissent pas), que j'ai finie l'année dernière. J'ai fait un bac S, et en terminale je me rendais compte que je n'avais aucune envie de continuer à faire des sciences dures, même si j'avais d'assez bonnes notes dans ces matières. J'ai donc fait quelques recherches sur Internet, et sur le site de l'onisep on conseillait la B/L "pour les plus littéraires des scientifiques", je me suis dit que c'était pour moi. Le côté "ouvert sur le monde", tout en continuant à faire de la philo, de l'histoire, des maths, etc. me plaisait.
On t'a encouragé à faire ça ?
Non, pas du tout. Mes parents rêvaient que je sois médecin et le jour des résultats du bac mes profs m'ont dit que c'était un immense gâchis de se lancer dans une voie littéraire alors que j'avais eu des notes excellents en chimie et en bio. Quant à la conseillère d'orientation que j'ai rencontrée, elle ne savait pas ce qu'était une B/L (faut la comprendre, ça n'existe que depuis 1983...) Bref, tout le monde semblait ignorer que la B/L est ouverte avant tout aux bacheliers scientifiques et économiques, et que les littéraires n'y sont acceptés que s'ils ont suivi l'option maths au lycée.
Avant de rentrer, tu pensais avoir le niveau ?
Je ne me posais pas trop la question, en fait, parce que je ne savais pas du tout quel niveau on attendrait de moi. Je ne m'attendais pas à être complètement à la traîne, vu que j'avais toujours eu de bons résultats au cours de ma scolarité, mais je savais aussi que tous ceux qui seraient avec moi seraient dans le même cas... Je me suis quand même pris une grosse claque au début, je n'étais plus l'élève brillante que j'avais toujours été, et je me souviendrai toute ma vie du jour où j'ai eu la première copie en lettres (la prof classait les copies par ordre croissant au moment de les rendre...), c'était un 3 avec une remarque horrible, alors que j'avais toujours pensé que les lettres étaient MON truc. Bref, au final j'ai été une élève de prépa moyenne, j'étais loin de la tête de classe mais mes résultats étaient, disons, corrects.
Si t'as arrêté avant la fin, pourquoi ?
En début d'hypokhâgne pas mal de gens arrêtaient, donc forcément je me suis posé la question. On a compris plus tard que les profs s'efforçaient d'être particulièrement horribles au début, histoire "d'écrémer" la classe et de pousser à partir les moins motivés. Finalement je suis restée, et en fin d'hypokâgne je voulais vraiment passer en khâgne. Mais au début de la khâgne, pareil, je n'étais vraiment pas bien, et là j'ai sérieusement songé à arrêter. Je ne sais pas trop pourquoi je ne l'ai pas fait, sans doute parce que je redoutais trop cet aveu d'échec, mais je ne regrette vraiment pas de m'être accrochée.
Quels avantages/inconvénients ? (Ambiance, travail, culture...)
L'ambiance était vraiment bonne, le côté petite classe où tout le monde se connait est agréable, d'autant plus maintenant que j'ai testé aussi l'impersonnalité d'un amphi. On s'est tous entendu très bien, je revois régulièrement la plupart des gens qui ont été avec moi, et je pense que certains seront mes amis si ce n'est toute ma vie, du moins une bonne partie. Comme on ne sortait pas aussi souvent que les étudiants de fac, nos soirées étaient toujours mémorables, j'en garde un excellent souvenir.
Mes profs étaient géniaux, aussi. Bon, certains étaient de vrais profs de prépa, à nous dire qu'avant de manger, il faut penser à travailler, et ce genre de trucs, mais d'autres étaient vraiment "humains", dans le sens où ils s'inquiétaient pour nous si on avait l'air de ne pas aller bien, nous conseillaient de rentrer chez nous pour dormir un peu si on avait une tête trop horrible, etc.
Ce qui est sûr, c'est que je n'ai jamais travaillé autant que pendant ces deux années, et je ne pense pas que j'aurai dans ma vie à travailler encore autant, du moins sur une aussi longue période. C'était ça que je trouvais le plus dur : travailler cinq, six heures de suite après les cours, ok, mais remettre ça le lendemain, et le surlendemain, etc., c'était vraiment épuisant. Mais comme je n'avais pas du tout l'ambition de réussir le concours, je travaillais pour moi, et ça avait des côtés agréables le plus souvent. Et puis avoir une bonne note pour un devoir dans lequel je m'étais vraiment investie était vraiment jubilatoire. En tout cas il est certain que j'ai acquis des méthodes de travail pour toute ma vie, je suis beaucoup plus rapide et efficace qu'il y a trois ans, et j'ai plus que doublé ma culture historique, philosophique, littéraire et économique.
Bref, même si au jour le jour c'était vraiment difficile, et même si j'ai pu haïr ce que je faisais, j'en garde avec le recul un excellent souvenir, et si je devais recommencer je n'hésiterais pas..