Il a recommencé. Cette ordure a recommencé. De nouveau une pluie d'insultes sur ma gueule. SALOPE, tu es une SALOPE. Tu ne branles rien de tes journées (...) regarde-moi ça tu passes toutes tes journées sur l'ordi. Grosse Salope. On te donne tout, t'es payé à rien foutre. SALOPE. T'es un cancre. Tu sais ce que c'est un cancre? T'es un cancre. Tu vaux rien. Tu fais jamais rien pour moi, tu penses qu'à ta gueule, toujours. T'as jamais rien fait pour moi, tu m'aides pas, SALOPE. Il faut tout faire pour toi. Et toi c'est toute une histoire quand on te demande un truc. Ferme ta gueule SALOPE (...)
Cette ordure a recommencé. Je l'ai viré de l'appartement. Il a sonné alors pendant une heure à mon appartement, tapé à la porte, chuchoté "Ouvre-moi, s'il te plaît". Appelé sans cesse sur mon portable et ma ligne. Et de nouveau sonné, sonné, sans arrêt à la porte. Il était neuf heures du matin, un samedi putain, avec les voisins qui entendent tout, notamment l'enculé du haut, le taré du haut qui finira par me faire un sale coup.
J'ai essayé de me rendormir, j'avais sommeil et comme je m'en doutais, ma mère a fini par venir, frappant à la porte: "Ouvre". Locution implacable. Comme je le savais, elle est dans tous ses états: "Comment je fais, il m'a appelé, il pleurait à mort, il est en ville et tu veux plus lui répondre. Je fais comment, moi?" Avec son air accusateur, culpabilisateur. Elle recommence: "Réponds-lui bordel. Tu es lâche, et c'est moi qui écope. Qu'est-ce que je vais lui dire moi? Ca recommence, il va m'appeler sans arrêt." Signification: Ne sois pas méchante, il t'aime, réponds-lui et reprends-le. Un ordre encore une fois implacable. une culpabilisation intense: Tu es méchante, le pauvre. Un déni de ma souffrance, de mes ressentis à moi.
Dix fois cette situation s'est déjà passée, dix fois j'ai repris cette ordure parce que ma mère m'y poussait, me faisait culpabiliser, parce qu'il jouait sur elle et que j'étais comme OBLIGEE de leur céder à tout les deux (...)
Mon équilibre, mes choix, mon bonheur, on s'en tapait. Je cédais à leurs deux volontés.
C'est fini. STOP.
Toi, ma mère, trente ans bientôt que tu diriges ma vie. Tu l'as dirigée par peur, par panique, par terreur de tout ce qui pouvait m'arriver. A cause de toi, je n'ai pas vécu "normalement", comme toute personne qui se forge, grandit. Tu m'as étouffée de ton emprise, tu m'as bouffée, tu m'as liée à toi, aucune décision ne comptait venant de moi, tu as dirigé, possédé mes choix. A cause de toi, à cause de tes névroses, que tu ne resouds pas, j'en ai payé les pots cassés. Tu m'as appris à vivre dans l'angoisse, la peur de l'autre, la frustration et la culpabilisation permanentes.
C'est fini. Je suis en psychothérapie depuis 2 ans, je sais maintenant les raisons, les causes de mes gros troubles aujourd'hui. Je sais que toute ma vie jusqu'à aujourd'hui j'ai payé la vie des autres au prix de ma propre vie. Je ne veux plus, plus jamais. J'ai dû prendre sur moi tes propres névroses en plus des miennes, celles que tu m'as transmises, celles que tu m'as créées et celles que j'ai rencontrées au passage.
Tu es ma mère, tu es la personne qui compte le plus au monde pour moi, mais c'est fini, maintenant, là, aujourd'hui, de diriger ma vie. Tu entends, c'est fini! Inutile de me faire culpabiliser, d'hurler, de me faire peur, de me menacer. Ca marchait auparavant, ça a tellement marché (...) je te craignais tellement.
Maintenant, j'ai compris. J'ai compris pourquoi je n'ai jamais pu grandir, j'ai compris pourquoi je n'ai pas pu devenir une jeune femme, puis une femme, puis une mère tout court, et une adulte, surtout. J'ai compris tout ça.
Et toi, espèce d'enculé, tu m'as gâché cinq ans de ma vie, 5 ans, 5 ans à me faire voir le noir et le blanc en continu, à ne pas savoir sur quel pied danser, à me méfier, à avoir peur de ton caractère, à vivre constamment dans la peur de ta double personnalité, tes colères, tes insultes, ta haine envers moi et envers tout. Tu as joué le pire avec moi, le froid et le chaud, l'amour et l'horreur, tu m'as habituée à me sentir aimée puis haïe et surtout ce rabaissement permanent, constant, de ce que j'étais, de ce que je faisais ou devais faire. Oui, car toi aussi tu voulais diriger ma vie, tu as toujours voulu diriger mes choix, et mes décisions et mes avis jusqu'à mes goûts en eux-mêmes. Tu as voulu toi aussi me bouffer, me réduire à néant, m'englober dans ce que tu es, comme elle. Comme je t'en veux, comme je t'en veux. 5 ans à être traîtée comme une merde, comme une moins que rien, à entendre constamment: TU NE SERS A RIEN, TU NE VAUX RIEN. Cinq ans de démontage perpetuel. Tu as contribué à ma dépression, tu m'as poussée toi-même dans le vide. Tu es responsable et tu ne le réalises même pas.
En cinq ans tu ne me connais même pas, c'est ça le plus triste. Tu ne sais même pas de quoi je souffre (...) quelles sont mes angoisses, quelles sont mes peurs, mes terreurs. Tu n'as jamais voulu savoir, tu ne m'as jamais aidée, jamais soutenue. J'ai toujours été seule avec toi. Tu ne sais même pas pourquoi je suis suivie par toute une équipe médicale au CMP. Tu ne sais même pas que je n'invente pas mes maux, physiques tout comme psychologiques.
Ordure. Tu avais créé ton plan dans ta tête, fondé tout de A à Z et je n'ai pas obéi à tes plans, je ne me suis pas soumise à tes obligations. Tu as voulu me le faire payer, j'estime que j'ai aujourd'hui assez payé.
Et ni toi ni ma mère, entends-le bien, ni toi ni elle, vous n'empieterez plus JAMAIS sur ma vie. Tiens-le toi pour dit.