Il y a quelques mois, je venais raconter mon choc, ma surprise, ma déception après l'annonce de la grossesse de mon amie childfree. Elle me racontait qu'elle avait d'abord souhaité un IVG, que la vie avec un enfant lui paraissait inconcevable, qu'elle avait eu envie de mourir lorsqu'elle avait appris la nouvelle. Toutefois elle était rongée par la culpabilité, le doute: elle a grandi dans une famille avec une forte croyance religieuse, dans un pays où les droits des femmes ne sont pas reconnus; l'IVG, bien que correspondant à son désir initial profond, représentait vraiment le pêché, la pire trahison qu'elle aurait pu faire à sa famille, à elle-même, à l'être qu'elle portait. Nous en avons beaucoup discuté étant donné que j'ai d'autres croyances, j'ai essayé d'alléger ce poids, de déculpabiliser, l'encourager à écouter sa petite voix profonde, sans pour autant la guider vers tel ou tel choix. Sans compter sa situation de vie : partenaire rencontré dans le mois précédant la grossesse, à l'autre bout du monde 6 mois par année; situation professionnelle mitigée; elle qui cherchait à développer une petite entreprise dans la créativité, elle se retrouve à postuler chez Macdo. Bref. Quelques mois plus tard, je la revois : rayonnante. Poursuivre la grossesse aurait été la meilleure décision de sa vie. Alors son partenaire semble impliqué, c'est bien. Sa famille est fière. Elle ne me parle que de cela. Elle me propose - tenez-vous bien- une soirée méditation sur le thème "bénédiction de l'utérus". Je suis stupéfaite et assez outrée; je veux dire, elle me sait childfree convaincue et avant sa grossesse, elle ne l'a jamais remis en question. Sans compter que je ne suis pas très fan de méditation. Je lui ai répondu, tout bas, que j'aurais préféré une ablation de l'utérus, qu'une méditation, puis je me suis vite reprise car "ôh mon dieu quand même je ne peux pas dire une telle infâmie à une femme enceinte!". Donc voilà. J'ai l'impression qu'en l'espace de quelques petits mois, nos réalités se sont déconnectées, on ne partage plus comme avant. On ne sort plus, on ne découvre plus. Plus de spontanéité, d'exploration. C'est triste, mais tant pis.