Je ne pourrais pas te dire exactement car je n'ai pas regardé le topic depuis mais l'impression que ça m'avait laissé en lisant c'était surtout "Oui c'est trop vrai cet article!" et je me suis dit que ça ne devait pas être très représentatif des avis sur le sujet étant donné que la cancel culture est très présente dans le militantisme intersectionnel, qui est très présent sur MadmoiZelle. Il y a plein de gens qui l'appliquent très sincèrement en pensant faire quelque chose de valide et pertinent d'un point de vue militant, donc ça me parait un peu déformé que 90% des posts soit contre.@MorganeGirly Par curiosité, pourquoi tu trouves que les discussions sous l'article sur la cancel culturel sont trop consensuelles ? Je n'ai pas trop eu cette impression moi.
Le concept de "white feminist" n'est pas absurde en lui-même selon moi. Ce n'est pas qu'on n'a pas le droit de parler quand on a des privilèges, mais que parfois les choses qu'on défend avec beaucoup de passion et de virulence peuvent être très nocives pour d'autres catégories, sans qu'on le réalise forcément.Enfin, ce truc de "white feminist", je trouve ça vraiment puéril et stupide, c'est vraiment se monter les unes contre les autres, ça n'a aucun intérêt. C'est limite lancé comme une insulte maintenant, mais qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'on doit fermer sa gueule quand on a des privilèges ? Qu'on ne sert à rien dans le combat féministe quand on est blanche et bourgeoise ? (d'ailleurs, on peut aussi être blanche et précaire, donc bon ) Evidemment que l'intersectionnalité a un intérêt, mais analyser les discriminations sous différents angles ça ne veut pas dire que seules les femmes les plus discriminées ont le droit de s'exprimer, les autres étant d'office considérées avec méfiance. Je trouve que c'est ridicule, en plus d'être une grande perte de temps.
Par exemple, si une femme défend le droit d'avoir accès aux gardes d'enfant jusqu'à 21h parce qu'elle est cadre sup et finit souvent le boulot à 20h/20h30, que le fait de ne pas avoir de garde d'enfants tard, ça la ralentit dans sa carrière, je comprends son point de vue, mais il faut aussi prendre en compte la personne qui va garder les enfants jusqu'à 21h. Il est fort possible que ce soit aussi une femme, plus pauvre, dans de nombreux cas racisée, et il faut donc s'assurer que ses droits de travailleuse ne sont pas affectés par les droits de travailleuse de la femme blanche bourgeoise. Par exemple, qui va garder les enfants de la nounou ou de l'employée de crèche entre 21h et 22h, pendant le trajet qu'elle va devoir faire pour rentrer chez elle après le boulot? Est-ce qu'elle aura aussi accès à des modes de garde? Est-ce qu'elle aura le temps de voir sa famille et de pratiquer des loisirs avec cette organisation du travail? Combien elle sera payée pour aider la cadre à faire son job?
Or, souvent, le "white feminism" a tendance à ne pas voir l'impact des revendications de femmes aisées sur les femmes plus pauvres. Ce n'est pas forcément de la mauvaise volonté ou de l'égoïsme pur, c'est très souvent que les féministes aisées n'ont pas l'expérience de ces femmes plus pauvres et ne réalisent donc pas toujours que leurs problèmes de féministes bourgeoises s'entrechoquent avec des problèmes de femmes moins riches.
C'est un exemple parmi d'autres, mais dans ce cas, la grille de lecture "white feminist" ne me parait pas absurde.
De même que lorsque des associations féministes vont faire des grands discours ou des grandes campagnes à coup de témoignages et de statistiques qui en fait s'appliquent essentiellement aux femmes blanches d'un certain niveau social, ça biaise les revendications et ça peut mettre sur le carreau les femmes racisées ou pauvres voire les invisibiliser totalement dans le combat parce que les féministes blanches parlent fort et croient avoir mis le doigt sur LA cause du siècle.
Et il y a vraiment certaines féministes qui refuse de revoir leur point de vue quand on leur montre la situation d'autres catégories de femmes parce que le problème dont elle parle leur tient à coeur ou que comme c'est leur quotidien à elles, elles croient vraiment que c'est le problème le plus important, et sont donc un peu autocentré. Typiquement, je trouve que beaucoup de "féministes institutionnelles" comme l'ex-Ministre des Femmes Laurence Rossignol ou même Marlène Schiappa maintenant ont cette tendance au "féminisme blanc" qui fait passer des causes qui tiennent en priorité compte des problématiques blanches et bourgeoises avant celles d'autres femmes.
Donc ce terme, je le trouve plutôt pertinent. Oui, il peut avoir un côté dérangeant pour la personne ciblée, mais après tout pourquoi pas. Si tu es une féministe blanche sincère dans ton engagement et que tu te fais traiter de white feminist, ça peut t'alerter sur la posture que tu as prise sans le vouloir, et tu vas ensuite plus réfléchir aux questions raciales et sociales dans ton militantisme.
Par contre, je trouve dérangeant que ce terme soit utilisé sans véritable but politique, simplement pour discréditer. Typiquement, traiter Nathalie Portman de white feminist dans ce cas précis, je ne vois AUCUNE pertinence. Sa robe faisait mention de femmes étrangères et de femmes racisées, donc elle n'était pas en train de les invisibiliser, et en dehors de ça, je ne vois pas en quoi elle faisait la promotion d'une cause qui profiterait aux femmes blanches et riches au détriment des femmes pauvres et racisées. Malheureusement, la réalisation d'un film nominable aux Oscars n'est pas vraiment une cause qui concerne les femmes les plus pauvres, mais ça ne leur nuit pas non plus à ma connaissance et on ne peut pas reprocher à Nathalie Portman de se saisir de ce sujet plutôt que d'un autre puisqu'elle est actrice, réalisatrice et productrice, donc elle parle pile poil de son secteur d'activité. Et si on traite l'engagement de Nathalie Portman de "white feminism" de manière générale, je me demande si ce terme s'applique vraiment à quelqu'un qui appartient à une catégorie exposée au racisme.
Donc la traiter d'hypocrite, pourquoi pas, mais de white feminist, je ne vois absolument pas le rapport avec son action aux Oscars, et pas trop avec sa personne, et ça démontre que ce terme est souvent utilisé dans un sens "bitchage" et pas dans un sens "dénonciation politique". Pourtant, il n'est pas sans pertinence et c'est donc regrettable qu'il soit parfois plus mis au service de la cancel culture qu'à celui de la progression des droits des femmes.
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