Bonjour tout le monde,
Je poste mon texte pour le dernier thème. Je ne sais pas trop ce que ça donne, ça fait longtemps que je n'ai pas pris une plume.
La rupture était proche, je le sentais. Je serrai des dents en voyant le coup que je ne pourrais pas esquiver, cette ultime frappe qui me serait fatale. Dans quelques instants je ne pourrais plus aider Louis, je devrais l’abandonner face à nos assaillants.
Au début, je n’étais pas grand-chose. Juste une connaissance, quelqu’un que l’on croise comme ça au détour d’une rue, une inconnue qui fait irruption dans votre vie un soir d’hiver mais qui ne chamboule en rien votre petite existence tranquille. Non, le changement vint après pour Louis. Des semaines s’écoulèrent avant qu’il accepte ma présence, des semaines durant lesquelles il apprit à me connaître, à découvrir tous mes secrets. De longues journées passèrent avant qu’il ne comprenne que je pouvais rester à ses côtés s’il voulait de moi, que je serais là dans ses moments de doute et qu’il pouvait compter sur moi pour le pousser à aller toujours plus loin, à lui donner la force d’avancer dans la vie. Et en quelques mois à peine, je devins sa béquille, son moteur.
Ca n’a pas toujours été facile. Il y eut bien des regards sceptiques quand Louis décida de me présenter à sa famille et à ses amis. Avec ses parents, le courant passa immédiatement. Ils m’ont adorée, m’ont admirée, moi qui n’existais pas pour leur fils il y avait encore quelques mois. Certains de ses amis m’acceptèrent également avec enthousiasme. D’autres en revanche me considérèrent comme une étrange lubie, une mode dont Louis se passerait vite et refusèrent de me revoir ou bien même d’entendre parler de moi.
Ils se trompaient. Je suis restée. J’ai épaulé Louis durant des années, je peux même me targuer de lui avoir donné des ailes. Comme c’était grisant de le sentir si libre, si jeune, prêt à avoir le monde à ses pieds. Rien ne semblait l’arrêter. Et quand des personnes mal intentionnées essayaient de le frapper, de le faire descendre de son piédestal, je réagissais, lui murmurais ce qu’il devait faire pour esquiver les attaques et maintenir ses positions. Certes, il y a des fois où je n’intervenais pas assez vite, des moments où les coups touchaient leur cible. Mais j’arrivais toujours à le soigner, à le relever. Après ses moments réconfortants, Louis me souriait, les yeux pétillants de malice. J’en aurais pleuré de joie.
Louis, mon cher et tendre Louis, j’aurais aimé que ces instants soient éternels.
Puis les choses changèrent. Les attaques devinrent plus régulières, plus sournoises mais surtout plus dévastatrices. Louis trébuchait plus souvent aussi, menaçant de tomber du haut du havre de paix que nous avions bâtit. Moi qui étais désormais inutile durant les assauts, je le relevais, je puisais dans mes forces pour l’aider à se rétablir. Et malgré ces difficultés, nous continuâmes comme deux partenaires inséparables. Malgré les souffrances, Louis me faisait toujours confiance et buvait chacune de mes paroles.
La victoire arriva par une chaude après-midi d’été. Les assaillants nous laissaient tranquilles depuis quelques semaines. Oh, ils envoyaient toujours un éclaireur ou deux dans l’espoir de trouver une faille dans notre muraille mais nous tînmes jusqu’à l’annonce de la bonne nouvelle. Revigorés, nous lançâmes une ultime attaque et écrasâmes nos adversaires. Pour la première fois depuis des mois, nous abattîmes les barrières que nous avions construites. Les ennemis avaient été chassés, plus besoin de protections. Nous accueillîmes avec joie ceux qui nous avaient apportés cette merveilleuse nouvelle.
Mais nous fûmes dupés. Ces gens apparemment si bienveillants se révélèrent être des ennemis plus fourbes que tous ceux que nous avions connus avant. Et ils réussirent là où les autres avaient échoué.
Après chaque attaque, Louis était au plus mal. J’essayais de toutes mes forces de l’aider à se relever mais vint un temps où ce n’était plus suffisant. Des heures sombres où Louis s’appuyait littéralement sur moi pour tenir debout et mettre un pied devant l’autre. Je lui murmurais que tout irait bien, que nous surmonterions cette épreuve comme nous l’avions fait si souvent. Mais je sentais la fatigue m’envahir progressivement et rapidement, je me mis également à trébucher. Jusqu’au jour où je lâchai Louis qui tomba lourdement de la colline où nous nous réfugions.
Il parvint à remonter avec difficulté mais quelque chose avait changé. Il me regardait désormais avec méfiance, me demandait de me taire quand je tentais de le réconforter. Quand il se sentait faillir, il n’acceptait qu’à contrecœur la main que je lui tendais. Je devenais folle, en proie à une angoisse sans cesse grandissante. Je pensais le voir se rapprocher de nos ennemis, de boire leurs paroles venimeuses. Jusqu’à ce terrible soir.
Ils vinrent en nombre. Ils étaient de toute origine, de tout âge. Lorsqu’ils lancèrent l’assaut, je sus que rien ne pourrait les arrêter. Je me plaçai pourtant entre eux et mon protégé, ce garçon souriant que j’avais vu grandir, dont j’avais admiré la beauté. Ce jeune homme que j’avais accompagné du mieux que je le pouvais, que j’avais aimé de tout mon être. Mais ce n’était pas cette personne qui me lança un dernier regard. Alors que le coup fatal allait me transpercer, je vis que les yeux de Louis étaient emplis d’un mélange de haine, de désespoir et d’une infinie tristesse. La vision que j’emportai dans la tombe était celle d’une personne brisée, épuisée avant même d’avoir pleinement vécue.
La douleur me saisit. Chaque parcelle de mon être poussa un hurlement déchirant avant que je n’explose dans un horrible fracas. J’entendis les morceaux de ce que j’avais été rebondir sur le sol dans une cacophonie hideuse, un mélange de sons répugnants et dissonants.
Comme toutes les illusions qui se brise, j’étais destinée à disparaître dans une lugubre symphonie.