Le weekend dernier, ma jeune coloc m'a invitée à faire un barbecue avec ses copines. Depuis quelques temps, elle sort tout le temps avec le même groupe, surtout des filles, et elle m'invite rarement mais je sais pas pourquoi elle m'a proposé cette fois. Je connais un peu ses copines (qu'elle connaissait à peine avant de soudain avoir une boulimie de déconfinement et de passer tout son temps intensivement avec elle
) et puis l'idée était sympa, donc j'ai dit OK. Une des copines a ramené son coloc, je pensais que c'était son copain au début. Et je vous raconte ça parce qu'il s'est rien passé de spécial, mais je me demande si je suis tellement en manque de compagnie masculine ou de gens nouveaux de mon âge ou quoi ou un ressenti réel
En gros, le mec, beaucoup plus proche de mon âge que ma coloc, était plus ou moins assis à côté de moi et on a un peu discuté. C'était pas des discussions de ouf hein, on a juste un peu échangé et en plus, je l'ai fait répété plusieurs fois car il a un accent régional (du pays où je suis) assez prononcé et vu que j'ai pas trop parlé à des gens du pays vu le confinement depuis mon arrivée, j'ai pas encore trop l'habitude de cet accent
. Il m'a posé pas mal de questions sur moi (enfin "pas mal", vu qu'il parlait aussi au reste du groupe et qu'on était pas là en même temps longtemps, c'était pas non plus pléthore de questions hein
) et on a un peu rigolé. Mais j'avais un peu un gros ressenti de comme quoi ça connectait bien entre nous et que je l'intéressais. A la fin, j'ai dû partir assez tôt car je partais en balade en weekend en solo et je devais me coucher pour pouvoir chopper mon bus le lendemain. Il s'est tourné vers moi et m'a dit avec beaucoup de conviction et d'enthousiasme "c'était vraiment super chouette de faire ta connaissance en tout cas". Et après, j'y ai pensé à intervalles réguliers toute la journée du lendemain
Le truc, c'est que TOUTES les filles du groupe quasiment étaient super mignonnes et étrangères (donc facteur exotique), je suis vraiment pas restée méga longtemps et je pense pas que nos échanges aient été ultra palpitants vu leur superficialité, donc la "connexion" qui a pu potentiellement existé, ce serait vraiment ce truc impalpable qui fait qu'on sent le potentiel avec une personne après quelques échanges rapides. Moi en tout cas, c'est ça que j'ai ressenti : ce mec a l'air bien cool, je sens qu'on pourrait super bien s'entendre et plus si affinités. Mais on n'a pas du tout flirté ou quoi.
Bref, je n'arrive pas du tout à savoir si ce sentiment que je lui plaisais est totalement une invention de mon cerveau en chien ou basé sur une réalité que j'ai ressenti
Autrefois, j'aurais été un peu plus sûre de moi sur ce point parce que je crois à mort aux intuitions. Mais après tout ce temps sans contact humain normal, j'arrive plus trop à faire la différence entre mes affabulations et mes observations
Parce que c'est à dire que très concrètement, c'est le premier mec avec qui je sociabilise en un an en face à face qui n'est ni mon coloc ni un membre de ma famille. Et encore, c'est même un cran au-dessus de mes colocs, car sur 4 colocs mecs, 1 (qui a déménagé) était marié, 2 sont clairement plus jeunes que moi et le dernier a l'âge de ce gars du barbecue, c'est-à-dire plus jeunes que moi mais on se rapproche de mon âge, donc la plupart des mecs qui ne sont pas de ma famille à qui j'ai parlé au cours de cette année étaient de base pas franchement dans ma cible.
Enfin voilà, je suis dans l'incapacité totale de vous dire si j'ai rencontré mon futur mari et je l'ai pressenti direct ou si je me suis fait un film dans ma tête secrètement assoiffée de contacts potentiellement flirty
Oui parce que je l'ai brièvement évoqué aussi, mais la question de l'âge c'est vraiment un truc qui commence à me peser. En fait, les gens disent beaucoup "l'âge n'a pas d'importance dans les relations amicales/amoureuses". Et c'est plutôt vrai dans l'absolu. Mais après 9 fois avec les mêmes personnes beaucoup plus jeunes que moi, bah j'ai fini par réaliser qu'il y a une différence entre être pote/en couple avec quelqu'un de beaucoup plus jeune quand on peut contrebalancer avec des gens de son âge ou plus âgé à d'autres moments et ne trainer QUE avec des gens beaucoup plus jeunes.
Ces derniers temps, je commençais à me sentir carrément pas dans le même délire, d'avoir le sentiment de ne pas être vraiment en mesure d'être comprise, de pas pouvoir vraiment partager tout ce que je pensais et ressentais car mes colocs n'en étaient pas à un stade où ça avait du sens/de la pertinence pour eux, etc. A tel point qu'en allant me faire vacciner, puisqu'ici on vaccinait par tranche d'âge j'étais donc la plus jeune à pouvoir être vaccinée... j'avais l'impression d'être à Disneyland de voir des gens de mon âge et plus âgés tout au tour de moi. C'était genre la première fois en plusieurs mois que j'étais ENTOUREE de gens de ma tranche d'âge, j'ai constaté avec étonnement que ça me réchauffait à mort le coeur!
Il y a plein de moments où j'ai l'impression que mes colocs ne comprennent pas très bien mes réactions ou mes décisions, et dans ces moments-là je pense souvent "je pense que tu comprendras dans 10 ans", parce que j'ai été à leur place, mais ça me frustre un peu de me dire qu'une partie de ma perception de la vie leur est totalement opaque parce qu'on n'a pas la même expérience de vie.
Donc du coup, y'a des moments où je me sens comme un vieux crouton pas très attrayant et un peu ennuyeux, et j'ai l'impression que mes jeunes années sont parties trop vite et d'autres moments où je réalise à quel point je me sens plus aboutie à 30 ans passés qu'à 20 ans.
J'ai lu quelquefois sur Twitter ces derniers temps des gens qui disaient que la société patriarcale avaient tout fait pour convaincre les femmes qu'elles étaient périmées et trop vieilles à 30 ans parce qu'en fait, c'est le moment où elles commencent à mieux s'affirmer et se connaitre sans tomber dans les manipulations d'autrefois. Franchement, ça me parle beaucoup.
Je me souviens qu'à 23 ans, quelqu'un avec qui je travaillais m'avait dit qu'il état étonné que j'ai fait "autant de choses" alors que j'étais "si jeune" (j'avais effectivement eu plein d'aventures pros et de voyage à cet âge). J'avais été très étonnée qu'il me qualifie de "si jeune" parce que j'avais terminée mes études, j'avais déjà à l'époque l'impression que je m'approchais de ma date de péremption et que j'étais plus si jeune que ça. Pareil, je lisais un bouquin des années 60 et l'auteur arrêtait pas de décrire son héros de 22 ans comme étant "d'une extrême jeunesse". Je me disais "extrême jeunesse"? Mais qu'est-ce qu'il raconte! C'est pas si jeune que ça 22 ans, on commence à devenir vieux! Bah repenser à ça me fait bien rire en fait car j'aurais effectivement tendance à penser que les gens de 22 ans sont d'une "extrême jeunesse" aujourd'hui
Donc en gros, ça fait une dizaine d'années que j'ai l'impression que je suis en train de me périmer à mort et que cette inquiétude me poursuit. J'ai cette impression qui flotte depuis très longtemps d'être en retard sur la vie et de trainer chez les jeunes alors que j'en fait plus partie, avec cette idée au fond de moi qu'être jeune c'est quand même mieux.
Ce sentiment de ne pas être assez bien car trop vieille, il est toujours présent au fond de moi mais en même temps, une partie de moi n'a plus du tout envie de faire partie de ce groupe des jeunes, parce que "ma jeunesse", c'était aussi ne pas avoir du tout le même pouvoir sur ma vie et la même perception de moi, c'était beaucoup plus se sentir dépendante de la valeur que les autres m'accordaient, ne pas avoir un sentiment aussi clair de mon identité. Je sais pas forcément bien où je vais, mais je sais la personne que je veux être et que je suis, et ce n'était pas du tout aussi clair quand j'avais 20 ans. Je laissais du coup beaucoup les autres influencer cette perception de moi.
Bref, je ressens beaucoup cette ambivalence de "la jeunesse est l'idéal" avec "je me sens plus forte à 30 ans passés", et j'ai un peu de mal à concilier les deux car je panique toujours en partie de vieillir trop vite.
Sinon, j'ai pensé à l'échange qu'on avait eu avec
@Osha sur les blessures car on a des formations "au bien-être psychologique" au boulot. Franchement, la plupart du temps ça me gave car ce sont souvent des formateurs américains (je suis pas aux USA mais boite internationale), et je trouve leur façon de faire pas du tout adaptée à la culture européenne. Ils sont super doucereux, un peu gnangnan, enfin c'est censé être bienveillant j'imagine mais je les trouve niais et creux en vrai à débiter plein de banalités en mode gourou du développement personnel. Mais on a eu une formation plus concrète sur les outils à notre disposition et on nous a expliqué qu'il y avait un programme dédié au deuil, et le formateur a précisé que le deuil c'était pas forcément le décès de quelqu'un, que ça pouvait être le deuil d'une vie passée, d'une carrière ou une rupture amoureuse quelle que soit sa durée. Il a expliqué qu'on pouvait avoir besoin d'accompagnement pour ce type de deuil parce que la spécifité du deuil, c'est que ça ne nous quitte pas vraiment, mais on apprend à vivre avec.
J'ai trouvé ça parlant par rapport à ce dont on avait discuté avant, parce que l'idée c'était pas qu'on reste des petites choses à réparer pour toujours ou que c'est forcément qu'on est devenus défectueux (c'est parfois le sentiment que j'ai quand je vois qu'on nous encourage à "guérir" d'un événement qui nous a marqués), mais juste que ça fait partie de la vie et que c'est simplement un paramètre supplémentaire avec lequel composer.
Enfin voilà des trucs en vrac quoi