Trois lectures de cette fin avril :
Ne me libère pas, je m'en charge : une collection de plaidoyers pour l'émancipation des femmes, du 17e siècle à nos jours, avec une préface de
Clémentine Autain. J'ai bien aimé cette préface, justement, il faut dire que j'avais pris ce livre justement parce que c'est une personnalité politique que j'apprécie, avec qui j'adorerais causer féminisme, et je trouvais intéressant de voir ses références, dans quoi elle se situe elle-même, etc. Pas de grandes découvertes pour moi, étant donné que ce sont des textes très courts, et des autrices connues, cela me confirme surtout ce que je savais déjà : Hubertine Auclert est magistrale, j'aime toujours lire Delphy, j'ai du mal à me concentrer sur des textes très anciens, il faudrait que je lise plus de Wittig pour m'en faire une idée plus claire, et Butler est à se taper la tête contre un mur. Un texte qui m'a particulièrement marquée et émue, cela dit : la pétition des femmes du Tiers Etat, de juillet 1789, qui m'a vraiment brisé le cœur.
Ces hommes qui m'expliquent la vie, de
Rebecca Solnit. J'avais lu l'article qui a donné son titre à ce recueil il y a quelques années, et en le reconnaissant à la bibliothèque, j'ai eu envie de le piocher pour voir...et c'est un gros gros mouais.
Ces hommes qui m'expliquent la vie est clairement le meilleur texte du lot, même si j'ai bien aimé
Cassandre que je trouve très parlant et actuel, et dans une moindre mesure celui sur ce qu'elle appelle "la police bénévole". Cela dit, ce n'est vraiment pas révolutionnaire, c'est très tiède. Assez frustrant par moment, elle a clairement conscience du réflexe "not all men", un texte est carrément consacré au #YesAllWomen qui tournait sur Twitter il y a quelques années en réponse à ces "not all men"...et pourtant, dans chaque texte, l'autrice se sent manifestement obligée de faire du "not all men". Cela donne l'impression d'une personne qui craint de dire les mots, de "sauter", d'assumer de peur de passer pour une mégère ou de vexer un lecteur, et clairement, je n'ouvre pas un livre qui se veut féministe pour lire que l'autrice a des amis hommes et connaît des mecs formidables. J'en ai rien à foutre, mais alors à un point... (Sur un autre sujet, ces derniers jours, je lis du Lordon, et CA FAIT DU BIEN de lire quelqu'un qui ne s'excuse pas de penser et qui n'est pas d'une tiédeur mortelle.)
Sigmaringen, de Pierre Assouline. Ce n'était pas exactement ce à quoi je m'attendais, mais j'ai apprécié ma lecture quand même, sans que ce soit un coup de cœur (mais je suis difficile, il faut le dire). Au vu du résumé, je pensais que la romance serait plus présente, or elle ne se met en place qu'à la moitié du livre et reste très très discrète, bien que jolie, on nous dit au final très peu de la relation entre Jeanne et Julius (et du coup, la surprise à la fin n'a rien de très surprenant : on ne l'a pas spécialement vu venir, mais on ne s'est pas imaginé autre chose pour autant, donc bon, ça ne m'a fait ni chaud ni froid, juste "ah, d'accord"
), on sait très peu de choses sur Jeanne tout court, d'ailleurs. En fin de compte, c'est vraiment centré sur la vie au château pendant cette drôle de parenthèse des pétainistes à Sigmaringen, les embrouilles, les ragots, les passe-temps, la déprime, l'absurdité de tout ça, la vie du personnel de maison allemand et français. Le château et Julius apparaissent comme des êtres hors du temps, une continuité brisée par la guerre dont ils espéraient restés isolés. Julius est un personnage intéressant, un homme ordinaire, qui n'a rien d'un résistant mais qui a un sens moral, qui s'interroge, qui cherche à se situer dans l'Histoire dont il a conscience par son travail pour l'aristocratie et son intérêt pour la musique. Hans, Erwin et Werner qu'on voit évoluer (ou pas, dans le cas de Hans, dont la déprime serait à la limite du comique de répétition s'il n'avait pas raison) au fil des pages.
Je lis dans le même temps une Histoire de la milice, qui complétait bien la galerie de portrait des personnages historiques réels qui apparaissent dans le roman, et Sigmaringen m'a toujours fascinée, je me doutais que la lecture serait plaisante. Mais encore une fois, moi qui croyait m'embarquer dans une romance, c'est encore raté !