destynova;4221828 a dit :
Hello,
Je viens de tomber sur cet article sur le blog des 400 culs (je regrette d'avoir cliqué) :
http://sexes.blogs.liberation.fr/agnes_giard/2013/07/ados-et-porno-o%C3%B9-est-le-mal-.html?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter
Qu'est ce que vous en pensez? Moi perso je ne suis pas contre le porno, mais contre la façon dont le porno est fait.
J'avais déjà parlé ici de mon expérience dans des classes de 3ème où je fais de l'éducation sentimentale et sexuelle et de l'influence qu'a le porno sur ces jeunes (pourtant très jeunes), leur rapport au corps, à la femme et aux "pratiques". C'est très violent déjà à cet âge là.
Comment peut-on croire que les gens ne sont pas influencés par ce qu'ils voient? qu'ils puissent faire la différence alors que même des adultes confondent parfois dans leur rapport à la femme le porno et la réalité.
Dans l'article ils disent que ce qui gène c'est de voir "des femmes sexuellement actives" je trouve que c'est vraiment de la mauvaise foi. En tant que féministe je suis pour la sexualité libre, mais dans le porno les femmes sont enfermées dans ce rôle, et même si elles baisent à tour de bras, leur propre désir est souvent effacé au profit de celui de l'homme (qui lui éprouve peu de plaisir par contre).
Je trouve que le porno, oui est dangereux. Pourtant je ne pense pas être une conservatrice, je n'irai pas dire à mon enfant "berk c'est caca" comme ils disent dans le texte.
Bref la question "où est le mal?" c'est vraiment de la rhétorique à deux balles mais ça m'énerve de lire ça parce que ce blog est connu, et qu'aujourd'hui dire qu'on est pour le porno ou la prostitution c'est la position un peu à la mode, ça fait "réac" et ducoup tout le monde suit, même le monde littéraire ou intellectuel qui se bat "contre la censure" sans se demander avec un peu de bon sens qu'est-ce que la censure censure exactement.
Graaaave la grosse hypocrisie intellectuelle que de dire que le porno représente des femmes sexuellement active et un côté "documentaire"...
Je trouve cet article hyper biaisé...
En fait, je me souviens du philosophe dont ils parlent, Ruwen Ogien. J'avais lu un article à la sortie de son bouquin
Penser la pornographie. A l'époque j'avais genre 16 ou 17 ans et son postulat me paraissait hyper intéressant : pourquoi les jeunes ont-ils le droit de coucher librement à 15 ans mais pas de regarder du porno avant 18 ans?
En fait, je trouve que c'est la seule vraie bonne question de l'article parce que c'est vrai que c'est pas forcément hyper cohérent de juger un jeune sexuellement mûr pour coucher comme il veut mais pas pour regarder.
Pour le reste, Ruwen Ogien n'a à ma connaissance jamais bossé avec des gamins et il ne se gêne pourtant pas pour nous expliquer comment ils vont réagir à ce type de documents. C'est un philosophe qui travaille au CNRS : autant dire que son point de vue est particulièrement théorique si ce n'est déconnecté des réalités du terrain...
Il y a des passages de l'article où on dirait qu'il se moque, j'ai envie de dire que ce n'est pas être réac que d'y croire, c'est être assez réaliste.
Tel ado aurait exigé une fellation de son petit frère après avoir visionné un porno. Telle gamine serait rentrée de l’école en prononçant des mots affreux appris au détour d’une discussion avec des grands… Et les tournantes, filmées par ces jeunes hilares : sous quelle influence, hein, ont elle été tournées comme de simples vidéos de vacances ?
En fait, là, moi qui travaille beaucoup avec des gamins, j'ai envie de dire "bah oui".
Pour l'exemple de la fellation au petit frère, je trouve ça incroyablement crédible. Là il parle d'un ado, moi je verrais très bien ça de la part d'un gamin de 8 ou 10 ans qui aurait vu une scène de sexe qu'il ne comprend pas et serait curieux de la reproduire, soit parce que ça l'intrigue, soit parce que ça l'a choqué et qu'il tente de la refaire pour la mettre à distance.
Et un ado tenu à l'écart d'un discours construit sur la sexualité peut être aussi tenté de "tester" chez lui.
Je ne pense pas que le porno soit forcément néfaste en lui-même. Personnellement, j'en ai vu pour la première fois quand j'avais 14 ans je pense (pas mal d'années avant mes premières relations sexuelles), et j'en ai vu plusieurs, comme plusieurs de mes amis/amies et je ne pense pas que nous ayions été marqués gravement par ces films.
Mais c'est en grande partie parce que j'avais à côté un véritable accompagnement des adultes avec de très bons cours d'éducation sexuelle. On avait accès à toutes les informations nécessaires et on avait aussi reçu une éducation générale suffisamment critique sur les produits culturels pour pouvoir prendre de la distance avec un film en carton pâte... On savait que le porno c'était "du faux", que ça ne représentait pas vraiment la réalité, on avait déjà lu des choses sur l'image de la femme etc.
Un enfant (c'est ce dont parle l'article) ou même un ado qui n'a pas reçu cet accompagnement ne va pas du tout recevoir ces images de la même manière. Il risque de les confondre plus ou moins avec la réalité car c'est la seule image vraiment concrète de la sexualité qu'il reçoit.
Moi j'ai longtemps cru que la sexualité des films classiques était complètement réaliste malgré toute l'éducation sexuelle que j'avais reçue. Je croyais vraiment que tu choppais un orgasme fastoche avec le premier venu, surtout si tu le kiffes à mort.
C'est pour ça que je trouve hautement probable qu'un gamin ou un ado mal informé soit tenté d'essayer de reproduire le porno en croyant plus ou moins que c'est la réalité.
L'attrait principal du porno, disons que pour un ado, c'est censé donner une illustration claire de "comment ça marche concrètement?". C'est plutôt sur ça qu'il faudrait travailler au lieu de libéraliser le porno : trouver un moyen de mettre en scène la mécanique sexuelle concrètement sans être du porno pour adultes libérés...
Cet article exagère beaucoup à mon avis sur la culpabilisation de la sexualité. Comme je l'ai dit, je travaille beaucoup avec des gamins et je n'ai JAMAIS entendu quelqu'un dire "beurk caca" si l'enfant touchait ses parties sexuelles. Que ce soit de la part des parents ou du personnel d'encadrement.
En général, on explique simplement à l'enfant qu'il ne devrait pas faire ça devant tout le monde, que c'est "privé", mais on ne lui dit pas que c'est sale ou mal.
Alors sûrement que dans certains milieux, on réagit avec dégoût mais ce n'est pas aussi généralisé que ça (c'est là que je me dis qu'il ne bosse pas beaucoup avec des enfants pour penser que tout le monde leur parle comme ça).
L'auteur fait comme si on disait "c'était mieux avant". Je doute que ce soit le vrai discours ambiant... C'est plutôt qu'avant les jeunes ignoraient tout et aujourd'hui ils croient tout savoir alors que c'est totalement faux. L'éducation par le porno n'est pas meilleure que pas d'éducation du tout : c'est parce qu'il y a une éducation sexuelle plus formelle qu'autrefois qu'on peut dire que les choses se sont améliorées, pas grâce au porno.