Il est 21h45 et je n'ai pas dormi la nuit dernière, donc il faut vraiment que je me magne d'aller au lit et de dormir.
Néanmoins il y a ce patient dans mon service, un homme que je connais et que j'ai apprécié, et aujourd'hui je vois le prix à payer pour ses erreurs (quelle tête de mule) et j'observe les médecins... ce que je suis sensée devenir un jour.
Et toute admiration s'envole, faisant place à une exaspération, une rancoeur, une colère. Le patient est-il réellement un patient? Ou bien n'est-il qu'un numéro de chambre, un numéro de dossier, une opération à venir? (et sans opération à venir, qu'est-il?).
Je ne vais rien lâcher, je vais surveiller ce qu'il devient/ce qu'on le fait devenir, et secrètement je prie, secrètement j'espère, secrètement je crois (ou j'aimerais croire) que je deviendrai véritablement un meilleur médecin qu'eux. Plus humaine, pas forcément plus talentueuse, mais plus humaine.
Demain je retourne travailler, la boule au ventre... Les hommes vieillissent et s'affaissent, ceux qui m'ont vue grandir deviennent ceux qu'il faut recoucher à la fin du déjeuner pour faire leur sieste habituelle...
Combien de connaissances, à son instar, auront besoin de mon aide alors que jadis ils veillaient sur moi? Je suis, depuis quelques jours, nostalgiques de mon enfance, du temps qui passe immuablement, du passé qui ne reviendra jamais, de ce qui a été à jamais révolu.
(ne pas citer)