Mon dieu, je craque.
Vivement la fin, parce que la tyrannie du vote c'est plus possible. Mardi, au travail, notre chef a lancé un débat sur "qui ne vote pas et fait le jeu du Fn". On aurait dit l'inquisition : "Untelle, c'est une gauchiste, je suis sûr qu'elle va pas aller voter."
Vendredi soir, verre avec un ami. "Alors ça te dérange pas de faire le jeu du FN ?". Il m'a harcelé toute la soirée en me disant que j'étais responsable de ce qui allait arriver si MLP était élue. J'ai reçu quinze sms : "Tu auras les mains tâchées du sang des arabes gazés par la faute, mais bon pour toi, c'est un détail.". Ironie du sort il me sort, cinq minutes après, "Ta pote Gertrude, c'est la Paki ?". Non raté gros raciste, elle est française et d'origine Indienne. Mais pour toi, fier Macroniste et défenseur du progressisme, c'est pareil. Ca me fait bien rigoler d'ailleurs les mecs qui mettent "les étrangers" en avant, alors qu'au quotidien ils sont infoutus de prendre part à la lutte anti-raciste. Et quand des gens se font tirer dessus par des policiers à cause de leurs couleurs de peau, il y a personne pour s'ériger en garant des droits de l'homme sur Facebook. Mes potes racisés supportent plus qu'on ose les prendre en otage pour justifier d'un vote Macron vu ce que le précédent gouvernement a fait. Ils trouvent tellement ça abject et iront pas voter eux-mêmes. Passons, please, sur les centaines de personnes tellement pas impliquée dans la politique, qui voteront sans doute ni aux législatives, ni aux régionales mais qui ont tout compris au Front républicain et aux enjeux de ce vote, aux éditorialistes qui descendent jamais en dehors de leur rédaction pour rencontrer les gens et donnent des leçons de civisme (d'ailleurs, Joffrin, je te crache dessus), aux mecs qui savent même pas ce qu'était le conflit Whirlpool avant que MLP ou Macron y mette les pieds. A vous, tellement satisfait d'avoir accompli votre geste de civisme, que vous vous affichez avec vos verres de vins sur Twitter, oui quel gros effort de foutre un bulletin dans une urne tous les cinq ans, en étant persuadé d'avoir sauvé la démocratie, bravo vous êtes des héros : foutez-moi la paix.
- Vous n'étiez pas-là quand nous étions dans la rue, pour dénoncer la loi travail. Pas-là non plus pour se battre contre l'Etat d'urgence. Pas-là, quand il fallait lutter contre le délit de faciès. Pas un mot pour Adama, pas un mot pour les lanceurs d'alertes condamnés à deux mois de prison pour avoir eu l'audace de lutter contre l'exil fiscal. Ne venez pas me parler de démocratie, vous n'avez pas de leçon à donner, pas sur Twitter;
- Ne prenez pas les racisés en otage, comme dirait une pote : vous les méprisez déjà assez à longueur de journée. On ne vous a pas vu commémorer le massacre du 17 octobre 1961. Cette date ne vous dit rien.
- Parce que nous ne faisons pas d'effort pour sauver la démocratie ? Quelles ont été les concessions d'Emmanuel Macron pour "maintenir le front Républicain" ? Parce que c'est à nous, électeurs, de devoir nous sacrifier mais pas aux politiques ? L'heure est grave, la démocratie est en danger mais Emmanuel Macron refuse de tendre une main ? Il méprise même en disant qu'il considérera que chaque vote pour lui est un vote d'édhésion ?
- J'ai vu le PS, un jour de débacle électorale, fustiger les électeurs "débiles et idiots", mépriser les abstentionnistes, cracher sur le FN : dans leur magnifique discours, personne n'a remis en question une seule fois le bilan de François Hollande, je ne suis pas une vache-à-lait.
- J'adore votre slogan "à voté", je vous félicite. Très étrangement, je ne l'ai vu ni au premier tour, ni aux précédents scrutin. Je ne vous ai pas vu, non plus, vous inquiéter de la montée du score de Marine Le Pen. Trop facile. Puisque vous aimez tant notre démocratie, j'éspère que vous la défendrez la prochaine fois qu'un citoyen d'une ville tenue par le FN se prend un procès (oui et pas juste pendant l'entre-deux tours hein) ou que Macron passe une loi atroce par ordonnance. J'éspère que vous serez là pour "sauver la démocratie" quand la sécu aura disparu, ou que la retraite sera repoussée à 80 ans.
Sur ce, puisqu'on m'a ouvertement présentée hier soir comme : Machine, fait le jeu du FN, a de parfaits inconnus. Je retourne dans ma bulle. A dans cinq ans.
(Je suis navrée de vous imposer ça, trop de violence, fallait que ça sorte)