@Loulalilou Hamon est la grande victime pour moi. Son programme est super et il a l'air réellement sincère, j'ai visionné pas mal de ses interventions (débat ou meeting) et j'aime beaucoup ce qu'il dégage : le calme de la réflexion mais également la fougue de plaider pour un nouveau mode de fonctionnement, de l'humour quand il faut, le rejet de l'homme providence (sur lequel pas mal de militants pro Mélenchon sont quand même à fond) qui est à mon sens une nécessité, la remise en question de ses forces et faiblesses (il n'assène pas qu'untel a tort ou à raison, il essaye juste de proposer quelque chose de différent et il explique pourquoi il y croit + certaines de ses mesures comme le 49.3 citoyen et la création d'un conseil de citoyens volontaires pour confronter théorie et pratique). C'est rafraichissant de voir un homme humble se heurter aux vieilles figures que sont Le Pen et Fillon, qui ne mâche pas nécessairement ses mots lorsqu'il est attaqué mais n'est pas irrévérencieux comme Mélenchon peut parfois l'être (vous l'avez compris, ça m'agace
).
Et ce qui est le plus triste, c'est que sa symbolique dans l'espace public se réduit beaucoup à "Hamon ? Mouais... Il vient du PS, vu ce qu'on a eu pendant 5 ans merci bien, et puis il est lâché pour Macron maintenant..." au lieu de mettre en lumière l'intelligence sociale de son programme. Ça me désole beaucoup. Surtout que Fuck le PS hein, celui qu'on a vu pendant 5 ans ce n'est PAS le PS, mon PS, celui qui est de gauche et se construit sur gommer les différences et les inégalités au lieu d'essayer de les aggraver ou les camoufler. A cause de la mollesse de Hollande qui a jamais voulu trancher ou hausser le ton, Valls qui est un vrai connard opportuniste (je ne sais pas pourquoi il est à gauche sérieux...) et qui a fait ce qu'il voulait quand il voulait, Macron et ses lois "tout pour l'argent !... Avec un peu de social dedans pour faire genre hein" secondé par El Kohmri qui enfonce le clou... Et les autres dont on entend jamais parler mais qui avaient pourtant de bonnes idées (comme ben... Hamon tiens, qui s'est barré avant qu'on puisse retenir son nom)... Ça donne un bordel monstre chapeauté par la légendaire nonchalance de Cambadélis qui pense encore qu'on y voit que du feu.
Ce sont, à mon sens, les responsables des 5 ans qu'on vient de vivre. Et le plus extraordinaire c'est qu'on les revoit ENCORE sur le devant de la scène parce qu'ils ont forcé cette opportunité. Les gens ont l'impression qu'on se tapera les mêmes personnes au pouvoir et ça leur fait peur, ce que je peux comprendre, mais honnêtement. En toute bonne foi. Vous croyez vraiment que Hamon ne note pas consciencieusement tous ceux qui se sont placés sur son chemin, qu'il va ensuite les accueillir bras ouverts avec un poste de ministre ? Valls a voulu se faire mousser en déclarant son soutien à Macron car c'était son unique moyen d'obtenir un poste de ministre, ce à quoi Macron a répondu "ok, merci bro mais tu peux aller t'asseoir sur ton futur poste !". Est-il allé voir Hamon et l'a t'il défendu comme il l'avait promis en signant la charte des élections ? Nah... Il sait que Hamon n'a AUCUNE envie de lui donner ne serait-ce qu'un poste à responsabilité dans son gouvernement. Et moi ça me fait réfléchir de voir ça, parce que si tous les gros pontes du PS se tournent vers Macron, c'est principalement par opportunisme, sans doute un peu parce qu'ils pensent qu'il a plus de chance de gagner (et encore, on le voit bien aujourd'hui, c'est pas une exactitude...) mais aussi parce que s'il y en a un des deux candidats issus du PS entre Macron et Hamon qui voudra les introniser ministres, lequel est-ce d'après eux ?
Je ne pense pas, honnêtement parlant, que Hamon = un nouveau quinquennat type Hollande. Il a déjà veillé à renouveler ses appuis : Taubira, Piketty, Galbraith (ancien conseiller d'Obama qui sera le parrain des 6 premiers mois du quinquennat de Hamon). Et ça ne veut pas rien dire... Je peux entendre qu'on soit plus proche idéologiquement parlant de Mélenchon plutôt que de Hamon, pas de souci, mais rapprocher ce dernier de ce qu'il s'est passé depuis 5 ans est, à mon sens, une erreur.
Pour ceux qui seraient tentés de dire que même si Hamon est élu, ceux qui ne l'ont pas soutenu au PS ne le feront pas non plus durant son mandat, et qu'il aura donc les mains liées. Je suis plus optimiste, non pas parce que les bisounours iront saupoudrer le sénat de poussière magique mais parce qu'on a des exemples, tout de même, de personnalités fortes qui seront à même de soutenir et défendre les projets (facile de citer Taubira mais il y en a d'autres). Le ministère ne comportera pas de réfractaires à Hamon, à moins que ce dernier soit suicidaire (mais j'en doute quand même beaucoup). Quant au sénat, on peut se poser la même question pour Mélenchon au final : comment vont-ils faire peser ce qu'ils disent dans la balance pour faire plier le sénat ? C'est là où je suis intimement convaincue que Hamon a une longueur d'avance : les seules influences qui peuvent faire tourner le débat en sa faveur sont les opinions publiques fortes (Hamon et Mélenchon en sont capables) mais également la propension du président et ses ministres à nouer des partenariats et des alliances avec d'autres influences (l'Allemagne, je te regarde ; et là je doute que Mélenchon fasse mieux). D'un point de vue diplomatie internationale on peut difficilement louvoyer : Mélenchon suscite la méfiance quand Hamon regarde déjà les autres influences comme des interlocuteurs (et c'est là que garder l'étiquette PS prend tout son sens).
Bref, oui, je reste sur ma position mais je demeure blasée de voir que certains s'arrêtent à l'étiquette sans prendre le temps d'en étudier les tenants et aboutissants.